◈ Missives : 9
◈ Âge du Personnage : vingt deux hivers
◈ Alignement : loyal neutre
◈ Race : Valdur
◈ Ethnie : Alsdern
◈ Origine : région de Tveit, royaume de Valdrek, Ordanie
◈ Localisation sur Rëa : Hildeborg, capitale de Tveit.
◈ Magie : Psychique, influence sur la volonté d'autrui.
◈ Fiche personnage : Svanhilde
◈ Âge du Personnage : vingt deux hivers
◈ Alignement : loyal neutre
◈ Race : Valdur
◈ Ethnie : Alsdern
◈ Origine : région de Tveit, royaume de Valdrek, Ordanie
◈ Localisation sur Rëa : Hildeborg, capitale de Tveit.
◈ Magie : Psychique, influence sur la volonté d'autrui.
◈ Fiche personnage : Svanhilde
Héros
Svanhilde Strand
◈ Jeu 14 Jan 2016 - 23:51
Magie Magie psychique, influence sur la volonté. Huitième jour de Margrh, an 89 de l'ère des Rois, Hildeborg, capitale de Tveit, Valdrek. Enterrement de Hargbard Strand, jarl régent de cette même région. L’air enveloppe le monde de sa distincte froideur, sans laisser une once de répit à ces êtres insignifiants. Ces créatures arpentant ces contrées en rampant, tels des animaux à l’agonie. Ces âmes dépourvues de cœur. Ces cruelles cruautés, terribles et implacables, proliférant sur ce sol gelé. Seuls. Et moi, je reste là. Je les observe, avec un certain intérêt, sachant pertinemment que mon souffle caressera leur peau et se glissera avec aisance dans leurs membres. Le silence est roi. Il déferle sur cette nature, souillée par la main de la race valdur, comme déferle le vent tempétueux et capricieux de l’hiver. Au dehors, comme dans les cœurs gelés de ces individus – dressés face à l’infinité de l’océan – l’hiver s’impose avec force, tandis que je m’immisce avec parcimonie. Les visages sont fermés, les têtes basses. Abattus. Ils ont l’air abattus. L’es-tu ? Les cieux sont étrangement bleus. Aussi purs que l’eau qui danse doucement sous tes yeux, laissant une mélodie agréable caresser ton ouïe et celle de tes compagnons. Aucun nuage de coton n’a osé déranger l’étendue céleste. Le soleil pâle de l’hiver – quant à lui – se pavane au dessus de ces contrés, comme un monarque. Seul. Et moi, je reste là. Je t’observe, avec un certain intérêt, sachant pertinemment que mon souffle caressera ta peau et se glissera avec aisance dans tes membres. Tes prunelles ne quittent plus le chaland qui s’éloigne du rivage, abandonnant derrière lui ce ponton de bois auquel il fût pourtant vigoureusement attaché, une poignée de secondes plus tôt. L’eau le guide vers le large avec délicatesse, consciente qu’elle ne doit pas briser cette structure boisée. L’embarcation fuit, comme pour échapper à son destin, comme si ta présence l’effrayait. Seule. Des crépitements. Du bois qui s’entrechoque. Des cordes qui grincent de douleur lorsqu’on les étire. Et puis, la mélopée des flèches qui transperce l’atmosphère, affamée, cherchant à tout prix à rattraper l’embarcation mortuaire. Le feu, qui s’était limité quelques secondes à ne se nourrir que de la pointe des flèches s’éveille alors, léchant le bois avec une délectation non dissimulée. Les flammes sont en joie. Pouvaient-elles rêver meilleurs mets ? Du bois à lécher, de la chair glacée à grignoter, des os à ronger. Pour elles seules. Et toi, tu contemples ce spectacle, tu t’accroches à tes dieux qui me sont inconnus. Je tourne autour de toi, me rapproche, t’écoute. Malgré le silence qui t’enveloppe, malgré tes traits fermés et illisibles, je peux lire en toi. La quiétude se brise comme du cristal. Aussi fragile que les feuilles dansant avec la brise glacée. Emiettées. Les pleurs et les cris capricieux d’un bambin dont la notion de respect n’est qu’inconnu résonnent dans ce climat endeuillé. Ses traits rosés sont tordus par ses vocalises insupportables. Aucune larme ne perle dans ses prunelles closes. Ses plaintes n’ont pas la même source que les tiennes. Il ne pleure pas le défunt mais la faim. La faim et non la fin. Tandis que le froid tente de mordre chaque parcelle de ta chair, ton sang se réchauffe sous ton épiderme, dans tes veines. La colère inonde chacun de tes membres avec vivacité et précipitation. Tu manques de tolérance et ta patience est aussi robuste qu’une fleur à la venue de l’hiver. Je le vois bien. Tu essayes de faire abstraction, alors que je rode autour de toi. Tu ne me perçois pas. Pas encore. Tes yeux bleus ne rompent pas le contact avec les flammes mais ta rancune ne se concentre désormais plus que sur cet enfant, tel un prédateur tournant autour de sa proie. Cependant, tes poings se serrent, matérialisation de ton antipathie. Ta patience – si peu développée – atteint déjà ses propres limites. Elle se fracasse contre ces dernières comme l’océan sur les roches aiguisées et sombres des côtes nordiques. Mais, tes traits sont immuables et ne laissent rien transparaître. Pourtant. Ne rêves-tu pas de le faire taire ? Ne souhaites-tu pas coudre ses lèvres ou lui arracher la langue ? Les idées tortueuses s’enchaînent dans ton esprit meurtri par la perte. Il hurle de plus belle. Assez. Assez. Sa mère le sert dans ses bras et le berce, comme pour le duper. Rendors-toi. Rejoins les bras de tes dieux dans un sommeil apaisé. Mais, bien évidemment, il n’a cure des bras réconfortants de vos divinités. Ses instincts primitifs s’expriment. Seuls. Alors, ton regard s’écrase sur le bambin avec vigueur. Pour ma part, je sens venu le moment de ma renaissance. J’y vois l’opportunité rêvée. Je t’enveloppe de ma douceur. Seule. Me sens-tu ? Oui, bien sûr. Tu devines ce changement imperceptible que je t’apporte alors que mon souffle s’immisce dans ta chair, dans tes artères, dans ton cœur et dans ton âme. Ne résiste pas. Abandonne-toi à moi, Alsdern. Laisse-moi te montrer les innombrables possibilités que je t’offre. Laisse-moi te guider. La sensation de posséder un corps valdur, imparfait mais dont la constitution est si bien pensée, m’avait presque manqué. Il y avait bien longtemps que je n’avais pas parcouru ces terres, ces êtres de ma voluptueuse brise. Ressens, Alsdern. Observe. Comprends. Du fait de ma toute relative puissance, je guette, patiente. Ton regard doit s’engouffrer dans les yeux de cette chose dérangeante, dans les pupilles de cet être faible, pour que je puisse agir. Après quelques secondes, que tu juges trop longues, l’enfant te contemple enfin. Il continue ses vocalises aiguës, qui te glaceraient presque le sang. Mais il te regarde, et tu prends cela pour un défi. Il semble attiré par la profondeur de tes prunelles. Elles seules. Moi, je frappe. Je me délecte, heureuse de parvenir à m’exprimer enfin dans cette prison charnelle que tu es. Vos regards s’agrippent l’un à l’autre. Seuls. Mon heure est enfin arrivée. L’être chétif continue d’hurler à la mort, mais il ne te quitte plus des yeux. Je l’en empêche. Il est si fragile, si chétif. Je peux malaxer sa volonté, lui faire sentir ma présence et mon influence. Il sent ma relative puissance. Il est seul. La tâche est encore ardue. Je suis faible, mon souffle est encore fragile mais, cet enfant est plus malingre que je ne le suis. Son esprit n’est pas encore formé, ses pensées ne sont pas développées, il n’a aucun moyen pour les exprimer. Il ne pense pas, il survie. Sa volonté n’est que primitive, facile à amadouer. Il se tait. Ses cris s’éteignent tandis que vos prunelles sont toujours attachées les unes aux autres. Pour ma part, je triture, je l’influence, je modifie, je joue. Je me délecte de ma renaissance. Le sais-tu ? Si j’en avais la capacité, je crois que je m’esclafferais, seule. Toi, tu restes stoïque, continuant d’accrocher ton regard à celui de cette chose que tu méprises tant. Tu prends la mesure de l’événement, sans le comprendre pour autant. Tu devines que tu es la raison ayant poussé cet être insignifiant au silence. Il s’est résigné, grâce à toi. Grâce à moi. Tu te sens secouée, comme sur un navire dans une tempête. Seul. Tu hésites. Est-ce la volonté des dieux qui a permis à la quiétude de s’imposer ou tes propres désirs ? Ton cœur tambourine dans ta poitrine, galvanisé par une excitation infinie. Sans en saisir le sens véritable, tu descelles pourtant ce changement, ces capacités que je t’offre. Alsdern. Je suis encore faible. Mais je te promets un futur insoupçonné. Tu romps le contact visuel, submergé par mon souffle. Tes prunelles rattrapent le chaland en flamme. Ce point de lumière vivace qui consomme la mort. Et puis, soudain, les cris reprennent, implacables. Un soupir caresse tes lèvres. Compétences, forces & faiblesses Arts de la guerre (Métier engagé : Jarl) - Maniement d’armes blanches (épée, hache : avancé) = De par son essence et sa lignée, ainsi que par manque d'un frère ayant pris les armes, Svanhilde s'est vue élevée par son père et son oncle. Ils lui ont transmis leurs savoirs. - Parade (boucliers : expert) = Plus que l'art de frapper, la Jarl a été depuis le plus jeune âge porteuse de boucliers. - Stratégie de combats & Tactique de guerre (intermédiaire) = Ayant appris des livres depuis bien jeune, malgré leur rareté, la Princesse s'est nourrie des récits à propos. - Commandement & Galvanisation (intermédiaire) = De par son rang, ainsi que son caractère, Svanhilde sait se faire obéir. Toutefois, elle ne saurait retenir une armée en cas de guerre, ni la commander à la perfection car elle n'a tout simplement pas l'expérience à propos. Ses connaissances restent théoriques et fondées sur sa formation. Arts de la noblesse & de la bourgeoisie - Lecture & écriture (Valdra, Kaerd : expert) - Étiquette (intermédiaire) = Par essence nobiliaire et par devoir, Svanhilde sait se comporter avec ceux de son peuple et afficher son autorité. Il n'est toutefois pas dit qu'elle sache évoluer au sein des sociétés Vreën. - Politique & Diplomatie (novice) = D'apprentissage imparfait suite à la brutale annonce de son avancée au rang de Jarl, Svanhilde n'a qu'effleuré les contours de la gestion d'une région tout autant que ses responsabilités. Encore jeune, elle aura temps d'apprendre. - Équitation (avancé) = Svanhilde sait monter, soigner sa monture. - Navigation (connaissances intellectuelles du domaine nautique ; commandement, manœuvre, etc : novice) = La flotte de Tveit est réputée et placée, mais Svanhilde n'a que connaissance des bases de la navigation des bâtiments qu'elle devra tôt ou tard commander. Compétences générales - Histoire & Géographie (Valdrek : avancé) = Nourrie de récits à propos de son royaume, la Princesse connaît son histoire et ses contours de manière fort correcte. ◈ Forces - Svanhilde détient un haut rang social. Elle est en effet la Jarl de la région de Tveit et la princesse du Royaume de Valdrek. Ces positions lui apportent donc une puissance politique non négligeable bien que chez les nordiques la puissance soit une notion bien éphémère. - Cette nordique – malgré son jeune âge et sa carrure peu imposante – est une guerrière. Si vous nous permettez de glisser un conseil à votre oreille attentive, sachez que sous-estimer cet être de petite taille a causé des torts et la mort à quelques hommes, notamment lors d'un raid auquel elle a participé alors qu'elle avait dix-huit hivers. - Cette jarl a un tempérament de feu quand bien même le froid ronge les contrés sur lesquelles elle évolue depuis sa naissance. Son éducation – calquée sur celle digne d’un héritier mâle – lui a permis d’acquérir un caractère dominant et ambitieux. - Le bien-être de son peuple est une de ses priorités, la rendant dévouée à sa cause et la poussant à faire de son mieux. Détentrice d'une volonté à toute épreuve, Svanhilde est une alsdern déterminée et prête à beaucoup de sacrifices pour arriver à ses fins. - Elle a des capacités de mémorisation intéressantes. ◈ Faiblesses - Sa position sociale est évidemment une force mais constitue également une faiblesse. En effet, son statut de princesse de Valdrek et de jarl de Tveit font d’elle une personne sujette à jalousie et envie. Sa vie est constamment en jeu dans un monde où la loi du plus fort et où les ambitions de chacun peuvent ruiner une atmosphère paisible. Svanhilde a conscience que sa position n’est jamais acquise et elle est – de ce fait – très prudente. De surcroît, elle n'est jarl que depuis peu, ce qui pose parfois des difficultés auprès de son peuple. Des individus peuvent encore remettre sa légitimité en question même si elle a prouvé sa force à plusieurs reprises. - Sa franchise peut froisser son entourage. Elle sait se montrer diplomate et patiente mais étant d’un naturel autoritaire, elle sait également remettre les gens à la place qu’elle estime correcte. Ce franc-parler est créateur d’ennemis, surtout au sein de la gente masculine. - Son sexe. Svanhilde, même si elle a été élevée comme un jeune héritier n’en reste pas moins un être disposant d’un con. Et cette situation la rend par principe plus faible dans un univers où l’homme détient le statut de sexe fort – ce qui a bien évidemment le don de lui provoquer des crises de nerfs. - Sa jeunesse peut également être une faiblesse. Svanhilde est un être persuadé d’avoir raison. Elle est par essence ambitieuse et a des projets politiques pouvant paraître étonnants. Cette originalité et son manque d’expérience peuvent constituer un obstacle non négligeable dans la réalisation de ses projets. - Son caractère instable. Svanhilde est un être colérique dont les accès de colère ne sont pas rares et épuisant pour son entourage. A trop jouer avec le feu et la patience de ses proches, elle risque de creuser sa solitude. Physique Taille : cinq pieds (1m63). Poids : cent vingt-cinq livres (un peu plus de 62kg). Prunelles : d'un bleu profond et tempétueux. Cheveux : proche de la couleur de l'astre lunaire. Septième jour de Margrh, an 89 de l'ère des Rois. Hildeborg, capitale de la région de Tveit, Valdrek. L’eau chaude glissa de la carafe d’argile pour se déverser dans celle qui stagnait déjà dans le cuvier en bois. La rencontre de ces deux sources d’eau se fit dans des remous poétiques et dansants, la nappe aquatique formant des cercles parfaits du fait des vibrations. La vapeur surplombait le liquide comme le brouillard vient envelopper les contrées du Nord, lorsque le soleil peine encore à s’étirer dans les cieux. Elle donnait l’impression de vouloir s’étendre dans l’entièreté de la pièce, mais le froid constituait une barrière qu’elle ne pouvait traverser. Résignée, elle se mourrait quelques pouces au-dessus du liquide vital. La mélopée de l’eau résonna dans la pièce éclairée par des bougies et un feu de cheminée avant de s’éteindre lorsque la dernière goutte retrouva l’océan contenu dans ce cuvier. Les vagues – d’abord vivaces – commençaient à perdre de leur splendeur. Des doigts fins et agiles étaient quelque peu transformés par les mouvements de l’eau. Les perspectives et impressions changeaient sous ce liquide incroyable. Elle observait ces mains. Les siennes. Sous l’eau, elles semblaient encore plus pâles qu’elles ne l’étaient déjà. Aussi blêmes que l’astre lunaire, aussi immaculées que les premières neiges. L’eau de son bain avait creusé des tranchées dans sa peau, formant des rides qui – au fil du temps – s’inscriraient définitivement sur son épiderme. Un soupir caressa ses lèvres pleines et rosées. Des lèvres dépourvues de sourire. Une bouche close à l’allure mélancolique. Ne vous fiez pas à ces lèvres charnues et douces. Jamais. Elle isola de l’eau dans ses paumes avant de la ramener sur son visage. Les gouttes s’écrasèrent sur ses traits et firent de leur mieux pour retrouver l’océan, glissant ainsi sur sa peau, emportées par la gravité et la volonté de retrouver leur entièreté. Les traits de ce visage étaient durs, comme s’ils avaient été taillés dans la glace des montagnes de ces terres. Ils possédaient la même froideur que l’hiver. Ses pommettes étaient parsemées de couleur rosée, du fait de la chaleur régnant dans ce cuvier. La peau était marquée par le climat du grand nord, asséchée par les vents glacés et sujette aux rougeurs. Elle n’était pas parfaite, n’avait pas la splendeur et la douceur des nobles Vrëens. Nonobstant, du fait de son rang privilégié, la détentrice de cette peau pouvait se targuer de posséder un épiderme passable. Car, ici, le froid ne ronge pas uniquement les cœurs et l’esprit. Il s’attaque au corps, sans faire preuve d’une once de scrupule. Plusieurs plaies laissaient leurs empreintes sur son visage, fraîches et luisantes. Une fine coupure courrait sur son menton tandis qu’une autre perlait sur sa pommette droite, plus épaisse, plus profonde. Le cruor sortait de son lit pour se mêler à l’eau auparavant claire, glissant sur les tâches de boues qui recouvraient certaines parcelles de son visage et du reste de son corps. Elle répéta de nouveau le même geste, tentant d’enfermer de l’eau entre ses doigts avant d’écraser les gouttes résignées sur son visage. L’eau se mêla au sang, à la boue, aux peintures bleues de son portrait avant de rejoindre la mer contenu dans le cuvier. Ces peintures, elle les arborent dès qu'elle est appelée à se battre. Ses joues creusées agrémentaient un peu plus ses airs sévères. Mais l’apogée de sa froideur résidait en ses prunelles qui se dévoilèrent alors que ses doigts finirent de retirer les résidus d’eau qui s’y étaient nichés. Un bleu incroyable. Tempétueux. Presque indescriptible. Un bleu qui vous perce et vous transperce, encore et encore. Une couleur qui ne vous laisse point de répit. Des yeux qui vous emprisonnent dans un blizzard. Qu’inspirent ces yeux ? Tant de choses. La force de caractère, la rage et la dureté. Lorsqu’ils vous emmurent, ils vous glacent le sang. Ces deux bijoux peuvent être un enfer. Ils peuvent vous faire plier. Vous céderez. C’est certain. La jeune femme laissa glisser son corps blême sous la surface, laissant l’eau envelopper ses membres de sa douceur et de sa chaleur, lui donnant l’agréable sensation de s’immerger dans un cocoon. Ses cheveux, si blonds, frôlant la couleur de l’astre nocturne, s’abandonnèrent à une danse ondulatoire. Leurs mouvements nonchalants rappelaient la chorégraphie des serpents. Ces cheveux étaient longs, fins mais nombreux. L’eau semblait les dompter, chose qu’il était – en revanche – quasiment impossible à faire lorsqu’ils étaient exposés à l’air libre. Le vent du nord avait la fâcheuse tendance à les rendre indisciplinés. Ils sont libres. Aussi libres qu’elle souhaite l’être elle-même. Soudain, ses doigts se refermèrent sur le rebord du cuvier en bois. Elle sollicita les muscles fins mais saillants de ses bras pour retrouver l’air véritable et s’échappa de cette prison aquatique. Des frissons parcoururent sa peau blême lorsqu’elle retrouva la fraîcheur de la pièce. Et d’un geste brusque et énergique, elle se leva, le visage cependant tordu par une douleur sourde et omniprésente. L’air se délecta à mordre chaque parcelle de son corps dénudé, recouvert ci et là par des ecchymoses et des plaies légères. La jeune femme resta indifférente à la température ambiante. Le froid n’était pas son ennemi. Tous deux avaient appris à s’apprivoiser. Presque. Un linge blanc enveloppa son corps avec délicatesse, comme s’il était d’une fragilité digne du cristal. Or, cet assemblage de chair et d’os n’avait rien de frêle. L’Alsdern n’avait rien de la fine couche de glace qui se déploie sur la surface des lacs, lorsque l’automne cède sa place à l’hiver. Sa peau – blafarde, presque translucide – était robuste. Aussi résistante que du cuir. La jeune femme n’avait pas les arguments des beautés enivrantes qui parcourent les contrées sharda. Après tout, son corps n’était qu’un outil forgé pour la bataille et non pour les charmes et autres combats charnels. Des années d’entrainement pour faire de ses membres une arme capable de faire couler le sang. De surcroît, elle n’avait aucune conscience de ces charmes naturels et féminins, ayant toujours évolué dans ce monde dans une coquille masculine, que l’on a confectionné pour elle. Elle avait un aspect relativement banal et ce qui pouvait susciter la fascination résidait en son charisme naturel. Ses doigts se saisirent du linge qu’une femme avait déposé sur ses épaules. Contrairement à la majorité de ses semblables, cette nordique n’était pas grande et sa carrure n’avait rien d’impressionnant. Cette caractéristique rare et étonnante trouvait sa justification dans les difficultés de sa mère à enfanter. Elle enjamba le cuvier de bois et ses jambes fines se libèrent à leur tour de l’enveloppe aquatique. Ses pieds quittèrent la douceur de la chaleur pour retrouver la dureté du froid et de la pierre. Le linge blanc perdait de son opacité au fil des secondes, l’eau grignotant peu à peu chaque pouce de celui-ci. On devinait alors aisément ses courbes peu féminines. Sa taille n’était pas aussi marquée que celle des Sharda du Nord. Elle n’était pas voluptueuse ni gracieuse. Ses membres étaient fins mais l’on devinait la musculature avec aisance. Sa gestuelle était brusque, dépourvue d’une once de douceur. La façon dont elle serrait le linge blanc entre ses doigts en était la preuve. Le linge immaculé et imbibé d’eau se colla à son abdomen, recouvert par une meurtrissure sombre, mêlant des couleurs bleues et violettes. Telle vague, l’ecchymose prenait naissance près de sa hanche droite pour remonter jusque son nombril. « Une fourrure, s’il vous plait. » La servante ne se fit pas attendre. Déjà la fourrure quémandée s’enroulait autour de son corps, réchauffant allégrement l’épiderme lunaire qu’elle recouvrait. Sans adresser le moindre regard à cette femme, l’Alsdern quitta la pièce, dans une démarche masculine et guerrière, les lèvres toujours pincées par une douleur qu’elle cherchait à dissimuler. Caractère Denier jour d'Aldar, an 90 de l'ère des Rois, Demeure du Jarl, Hildeborg, Tveit, région de Valdrek. Le soleil commençait à peine à lécher le bois froid et humide des différentes habitations formant la ville de Hildeborg. Timide, capricieux et encore endormi, il luttait contre la fraîcheur glaciale apportée par l’astre lunaire. Pour ma part, ma journée a commencé sans la perle jaune accrochée au beau milieu des cieux. Comme chaque jour, je suis arrachée au sommeil avant l’aube. J’ai des responsabilités, voyez-vous. Cette grande demeure, si somptueuse, ne peut être gérée par la seule volonté des Dieux. Ainsi, depuis des années, je parcoure ces couloirs de bois, ces tapis de fourrure et ces décorations riches et fastes. Rien ne m’appartient. Or, j’ai la chance de pouvoir faire partie de ce lieu. Ma valeur peut être assimilée à celle de ce meuble, de cette planche ou bien même de cette bougie accrochée au mur. N’allez pas croire que je formule ici une plainte de quelque sorte que ce soit. Cette vie me satisfait. Et ce, depuis plus de deux décennies. Mes pas me guident machinalement vers la chambre du Jarl. C’est un automatisme. Une habitude. Chaque jour, lorsque l’aube décide d’envelopper notre monde, mon devoir m’emmène vers cette porte en bois. Mes doigts prennent possession de la poignée et enclenche le mécanisme. Avec douceur, je pénètre dans la chambre. Celle-ci est grande, pour ne pas dire immense. C’est une des plus grandes pièces de la demeure et elle est décorée avec faste, signe de la richesse du Jarl. Des bois de cerf parcourent les murs en bois, des fourrures trônent également fièrement sur les poutres. Quelques meubles en bois sombre parcourent la pièce. La table ronde est recouverte de parchemins, de cartes et d’instruments pour la stratégie militaire. Des livres s’entassent également sur celle-ci. Certains, même, sont échoués sur les fourrures recouvrant le sol. Le silence règne en maître dans ces appartements. Seul le feu agonisant émet quelques sons. Le bois blanchi par les flammes crépite encore un peu, lassé et exténué par la nuit qu’il vient de passer. Le feu l’a parcouru sans lui octroyer une moindre once de répit. Il avait eu une faim de loup. Les cendres s’entassaient. Alors que mon regard se perd dans ces étincelles fades, je décide de nourrir ces flammes à l’agonie. Heureuses, ces dernières grossissent en réalisant la présence d’un nouveau met. Un sourire satisfait se dessine sur mes lèvres alors que je me tourne vers le lit. Le côté droit de celui-ci est occupé. A gauche, nonobstant, le lit est désert. Les couvertures ont été repoussées et le froid s’est mêlé à la chaleur déposée par un corps, jusqu’à l’envelopper définitivement, après une lutte sans merci. Je ne suis pas sotte. Et j’ai remarqué ce fait à de nombreuses reprises. Notre Jarl ne passe pas l’ensemble de ses nuits sans compagnie. Mais celle-ci s’évapore toujours avant mon arrivée. « As-tu perdu quelque chose dans ce lit pour le regarder avec autant d’attention, Alrun ? ». Cette voix me glaça le sang, tandis qu’un sursaut parcouru mon échine. Prise sur le fait. Pourtant, le Jarl n’a pas bougé. Toujours au fond de son lit, sous l’amas de couverture. La culpabilité commence à grignoter mon estomac et je ne sais plus quoi faire. Cette voix. Elle transpire le charisme, tout comme les traits du visage de ce chef. Cette voix. Elle impose le respect tandis qu’elle vous glace les artères. Le ton n’est pourtant pas agressif. Il est doux mais ferme. Autoritaire. Je balbutie mais n’ose finalement pas parler, car je sais que c’est inutile. Se morfondre en explication n’est pas nécessaire et n’aurait pour effet que d’aggraver mon cas. La patience n’est pas une qualité présente dans le cœur de ce Jarl. Et sa question n’appelle à aucune réponse. C’est un avertissement. Je suis avertie qu’il n’est pas bon de vouloir en savoir plus sur les occupations nocturnes de mon supérieur. Je me ratatine alors docilement et me dirige vers les rideaux qui emprisonnent la luminosité naturelle. « Ne les ouvre pas tout de suite. D’ailleurs, n’y touche pas, je le ferai ». Mes doigts frôlent les rideaux lourds de couleur pourpre avant de se raviser. Je ne suis pas étonnée. Malgré sa noble éducation, notre Jarl ne supporte pas qu’on lui rende service. Tous les serviteurs qui gravitent autour de sa personne ont le don de l’agacer profondément. Souvent, je l’entends répéter qu’être assisté est un signe de faiblesse. Le bruit des couvertures qui se froissent effleure mon ouïe et mes yeux se posent sur le Jarl. Son corps est nu et sa peau aussi blanche que les premières neiges. Je ne dis rien et ne montre aucun signe de gêne. Pourtant, j’ai toujours cette impression que lorsque notre Jarl se montre dans son plus simple appareil, c’est pour provoquer en moi un malaise. J’ai toujours la sensation qu’il teste mes limites ou bien qu’il pense que cela me fera fuir. Svanhilde. Jarl de Tveit et Princesse de Valdrek. Voici qui dévoile sa nudité sous mes yeux. Elle qui possède un corps jeune et plein de vie. Moi, j’ai dépassé la quarantaine d’année et je crois qu’elle se comporte ainsi pour me narguer. Je connais Svanhilde depuis sa naissance. A l’époque, je m’occupais de sa mère et il m’est arrivé de prendre du temps pour son bambin. Svanhilde a toujours été une enfant débordante de vie et à l’énergie inépuisable. Aujourd’hui, elle semble beaucoup plus calme même si je crains toujours la tempête. Car, Svanhilde Strand est un ouragan. Malgré cette apparence calme qu’elle ne quitte pratiquement plus, je discerne certains mouvements qui ne trompent pas. Elle a toujours tendance à craquer ses doigts un à un. Lorsqu’elle est assise quelque part, elle tape les ongles de ses doigts contre la table ou sur ses jambes. Ils gigotent alors comme une vague. Cette jeune femme ne peut rester immobile. Son corps doit toujours être en mouvement. Elle ne m’adresse aucun regard et se dirige vers la chaise sur laquelle est posée une fourrure dans laquelle elle s’enroule. Ses pas la mènent alors vers la cheminée et ses prunelles observent le feu danser. Moi, à quelques mètres, j’observe ses doigts qui tapent un à un son épaule. Et je reste silencieuse, tout comme elle. Svanhilde n’a jamais été bavarde. Cependant, elle est lunatique et colérique. Je sais que si l’envie lui prend, elle pourrait se retourner vers moi et me hurler dessus. Mais ce matin, elle semble de bonne humeur. Ou bien est-elle seulement indifférente, ce qui ne m’étonnerait guère. Cette jeune femme est énigmatique de par le silence qu’elle incarne. Être solitaire, elle n’en est pas moins présente pour son peuple. Svanhilde est impliquée malgré les apparences. Souvent, j’ai l’impression qu’elle n’écoute pas son entourage. Pourtant, elle n’oublie jamais ce qui sort de la bouche de ceux qui se sont adressés à elle. Lors des doléances, elle a l’habitude de regarder le plafond, comme si l’ennuie rongeait chaque parcelle de sa chair. Nonobstant, lorsqu’elle se décide à répondre, on prend conscience qu’elle a écouté la tirade du plaintif dans les moindres détails et que son silence s’explique par sa réflexion. Et elle ne prend jamais à la légère les demandes de son peuple. Notre Jarl est un être juste. Mais également un esprit libre qui n’en fait qu’à sa tête. Je n’arrive pas à savoir si elle a des conseillers ou s’il lui arrive de prendre en compte les différents conseils qu’on peut lui offrir. Elle est si bornée. Si persuadée de détenir la vérité et la raison entre ses doigts pâles. Peut-être est-ce son caractère ou le résultat de son éducation. Svanhilde est trop sûre d’elle. Tout du moins, c’est l’impression qu’elle souhaite donner. Car, je sais, pour l’avoir observée, qu’elle a conscience que sa place n’est qu’éphémère. Chaque jour représente une lutte pour conserver sa position dans ce monde sauvage. « Tu perds ton temps à venir ici chaque matin, Alrun. Je t’ai déjà dit que tu n’avais pas l’obligation de venir me réveiller ». Encore une fois, je ne rétorque rien, trop occupée à l’observer. Svanhilde n’apprécie pas spécialement qu’on lui tienne tête. Cependant, elle se délecte à tenir tête aux autres, surtout aux hommes. Assoiffée de reconnaissance, cette jeune femme cherche toujours à prouver sa supériorité. Elle n’a de relâche à démontrer aux autres qu’elle mérite son titre grâce à ses actes et son caractère, et non seulement à cause d’un nom hérité. De ce fait, elle est souvent dans l’offensive et parfois sur la défensive également. A tel point que je l’ai déjà vue avoir des accès de colère et de violence. Svanhilde aime les défis et a cœur à les relever. Ainsi, avec son éducation militaire, elle a pris goût aux combats. La jeune Jarl enfile ses vêtements en silence avant de se diriger vers les rideaux. Avec ses bras fins, elle les ouvre dans une gestuelle lente mais brute. La lumière filtre alors dans la pièce et illumine son visage pâle à l’aspect autoritaire. Ses yeux bleus semblent briller de mille feux sous cette luminosité matinale. Elle observe les rues de sa ville, avec un regard fier. Moi, je reste immobile, les yeux posés sur elle et son allure masculine, dans ce pantalon de cuir et cette tunique beige. Je me sens inutile, sachant pertinemment que notre Jarl refusera mon aide pour quoi que ce soit. Elle ne voudra pas que je range cette chambre, car elle se retrouve mieux dans son désordre. Elle refusera que je change ses couvertures, estimant que c’est à elle de le faire, quand elle jugera qu’il est temps. Elle me rejettera si jamais je lui propose de coiffer sa tignasse blonde emmêlée et sauvage. Alors, voyant que Svanhilde est plongée dans ses pensées les plus intimes, j’estime que le moment est opportun, pour moi, de quitter ces lieux. Mes jambes remuent, et me guident vers la porte quand la voix de la jeune femme s’élève avec douceur. « Alrun. Avant que tu ne partes vaquer à d’autres occupations, j’ai une question ». Mon corps se fige et je me retourne vers elle. Svanhilde n’a pas bougé. Elle est toujours en train de contempler l’extérieur. « Oui, mademoiselle ? ― Comment suis-je perçue par mon peuple ? » Un silence s’installa, tandis que mes pensées parcourent mon cerveau à toute vitesse. Cette question semble être une sorte de piège et je ne suis pas sûre de vouloir m’y laisser prendre. « Réponds avec sincérité, Alrun, tu sais que je ne supporte pas les courbettes. ― Je crois qu’il vous considérait comme l’héritière de Terkel Strand avant de vous voir aujourd’hui comme Svanhilde Strand. ― Bien. » Inventaire Un rang social conséquent ; Svanhilde possède un héritage non négligeable puisqu’elle est princesse du royaume de Valdrek depuis ses onze années. En plus de détenir ce titre de noblesse, elle est jarl de la région de Tveit, faisant d’elle un des personnages politiques les plus importants du Nord. Tveit ; en tant que Jarl de cette région, on peut aisément considérer qu’elle en possède l’étendue, d’une manière ou d’une autre. Elle veille au bon fonctionnement de cette région, récolte l’impôt et assure la sécurité. Des richesses ; son rang lui confère évidemment une vie paisible d’un point de vue financier. Tveit est une région relativement prospère et son statut de princesse lui permet également d’accéder à moult richesses. Bien sûr, Svanhilde n’est pas la plus riche de Rëa, mais elle n’en demeure pas moins une héritière. Une flotte composée de quelques navires construits par son peuple. Celle-ci est utilisée pour les explorations, les raids ou encore les voyages vers la capitale. Des serviteurs qui ont le don de l’agacer car elle ne supporte pas être assistée. Elle les trouve envahissants mais les laisse tout de même errer dans sa demeure, afin de ne pas les mettre à la rue, dans le froid meurtrier. Un équipement militaire complet ; Terkel Strand, roi de Valdrek et géniteur de Svanhilde Strand a toujours souhaité faire de sa fille un être doté d’un talent militaire. En plus de posséder une aisance certaine dans le maniement des armes, elle a également hérité du caractère ambitieux et militaire de son paternel. Ce dernier lui a d’ailleurs fait don de plusieurs biens militaires : des renforcements en cuirs, en fourrure et des plaques de métal pour former son armure de combat ; un bouclier formé de bois et de renforcements en métal qu'elle n'utilise que très peu, se battant essentiellement avec deux lames ; deux épées courtes et légères. Osulf, son cheval à la robe noire ; un étalon qu'elle affectionne depuis quelques années. D’innombrables tenues ; des robes colorés pour mettre en avant sa richesse mais qu’elle ne porte que rarement, se sentant mal à l’aise et faible. Des tenues plus masculines, mêlant pantalons en tissus ou en cuir, tuniques et chemises. Evidemment, elle possède de nombreuses fourrure et parures de ce type. Elle est également détentrice de bijoux, et autres babioles. Des ouvrages ; grâce à son statut social, elle peut se permettre d’acheter des livres afin de compléter une bibliothèque bien remplie. Même si les alsdern ne considèrent pas la lecture comme une activité essentielle, Svanhilde a toujours apprécier lire, ayant compris que le savoir y est niché, tandis que l’expérience se dégotte sur le terrain. Des amis ; ah mince, c’est pas là qu’on les range ? Région de Tveit Située à la pointe sud-est de Valdrek, la région de Tveit regorge de possibilités malgré le froid dont elle est la victime. En effet, cette zone – comme l’ensemble du Royaume – souffre du climat typique du nord de Rëa. De mémoire d’Alsdern, jamais la neige n’a quitté le Mont Heintje, qui trône fièrement au cœur de ces terres. La beauté de cette roche recouverte par des couleurs immaculées est sans pareille et emplit les habitants de fierté. Tous remercient Myra pour ce don incroyable mais peu osent s’aventurer au sommet de cette puissance rocheuse, quand bien même le peuple valdra se trouve constitué de guerriers incroyables. Cette montagne, à la puissance irrévocable, est également une frontière naturelle avec les terres du Jarl voisin. Tveit est une région qui, de prime abord, semble sauvage. La nature, libre et indomptée, conserve la grande majorité de ses droits. En effet, du fait des conditions difficiles, des zones escarpées et des nombreuses forêts, peu de villages se sont développés. Ils parsèment ci et là les terres de la région. Le plus souvent, ces derniers sont établis sur les côtés, car celles-ci permettent une ouverture non négligeable sur le reste du monde avec les océans que le peuple de Valdrek tente désespérément de dompter. On trouve quelques villages au pied du Mont Heintje, où du fer est extrait afin de concevoir les armes de ce peuple guerrier. La qualité de ce dernier est réputée à travers l’ensemble du royaume, permettant à la région d’être considérée comme relativement riche. De bons forgerons ont ainsi pu laisser leur talent s’exprimer sur ce fer souvent qualifié de pur. Nonobstant, le Mont Heintje regorge encore de maints mystères qu’il n’a pas osé dévoiler. Seuls les nains pourraient lui arracher le moindre de ses secrets. Les forêts constituent également une ressource extrêmement précieuse pour un peuple qui l’utilise à de nombreuses fins. En effet, les habitations de la région sont toutes conçues avec ce matériau naturel qui a le mérite de les isoler du froid puissant de la région. De surcroît, ces arbres permettent également la construction de drakkars, éléments essentiels et choyés dans la culture d’un peuple assoiffé de découvertes. La tannerie est également une activité qui a su s’imposer. Dans une région où les températures sont extrêmement rudes, la peau et la fourrure des animaux errant sur ces contrées s’est vite révélée être un allié non négligeable. Ces diverses ressources permettent de pallier au manque de fertilité des terres qui, parfois, peuvent être aussi dures que la roche elle-même. Il apparaît clairement que les contrées de Tveit ne constituent pas un trésor pour l’agriculture, bien au contraire. Les sols ne font pas pousser l’or. Il n’y a donc que très peu de paysans et ceux-ci font face à des difficultés extrêmes. Les valdras de Tveit ont tenté de développer diverses techniques de culture afin de tirer profit de ces terres. Or, toutes ces tentatives se sont soldées par de cuisants échecs. De ce fait, Tveit a développé un important commerce avec le reste du Royaume, permettant ainsi – par le biais de nombreux échanges – d’obtenir la nourriture nécessaire pour subvenir aux besoins primitifs des habitants. Mais dans la plupart des cas, et surtout dans les bourgs isolés, les habitants se débrouillent comme ils le peuvent. La chasse et la pêche sont des activités très développées. Les conditions de vie sont difficiles, expliquant ainsi pourquoi seuls les plus vaillants survivent mais également pourquoi les valdras ont bravé les dangers maritimes pour chercher des richesses ailleurs. *** Hildeborg est la capitale de la région et se situe à l’est de cette dernière, au bord de l’océan. Malgré sa position éloignée du Mont Heintje, il n’est pas rare de voir ce dernier rompre l’horizon et briser les cieux par sa hauteur et sa puissance. Son port, bien développé, constitue une porte d’entrée pour les marchandises des autres contrées avec lesquelles Valdrek a l’habitude de commercer. Quelques bateaux trônent fièrement aux abords des pontons en bois solides et sont prêts à partir voguer sur des océans déchainés, afin d’effectuer des raids sur des terres étrangères. Cette position permet à la région d’être relativement aisée. En effet, les activités maritimes et de pêche sont importantes et les forêts avoisinantes regorgent d’animaux. Hildeborg s’est, de ce fait, spécialisée dans la conception de drakkars, dans la tannerie et la pêche. La ville est relativement vaste, composée de nombreuses maisonnées en bois aux allures simples et rustiques. La plus grande abritant la famille du Jarl. Celle-ci se situe plus en hauteur et détient plusieurs étages. Elle est le signe de la richesse du Jarl. Malgré son aspect extérieur relativement simple, en comparaison aux demeures des nobles vrëens, son intérieur est très travaillé. Oh, rien de délicat et de subtil, car ce n’est pas dans la nature des Alsderns. Mais, fourrures, bois de cerfs, trophées de chasses et autres signes de richesse décorent cette vaste demeure. Depuis plusieurs décennies, le Jarl de cette région provient de la famille Strand. Ces derniers règnent en maître depuis l’an 39 de l’ère des rois. Osmond Strand – père de Terkel, actuel roi de Valdrek – s’imposa de force au sein de la région de Tveit, détrônant le Jarl de l’époque, dont le nom s’oublia dans les méandres du temps. Les Strand ont gouverné et gouvernent encore cette région avec fermeté. Cependant, cette famille a toujours eu la réputation d’être juste et courageuse. A chacune des batailles, le Jarl était présent et luttait au côté de ses guerriers, nouant ainsi des liens privilégiés avec son peuple. Aujourd’hui encore, cette tradition perdure. L’autorité des Strand a toujours été sans faille et vigoureuse. Les rares alsderns ayant montré signe de rébellion ne sont plus là pour témoigner de la force des Strand et de leur farouche volonté. Alors que la stabilité politique enveloppe Tveit depuis des décennies, les choses sont actuellement en train de changer de manière presque imperceptible. L’accession de Terkel Strand au trône de Valdrek remua la région au plus profond de son cœur. Les nordiques de Tveit étaient bien évidemment fiers de leur Jarl mais ils éprouvaient un sentiment d’abandon. Ce dernier n’avait aucun héritier mâle pour reprendre le rôle de Jarl et sa fille unique – Svanhilde – était bien trop jeune en plus d’être dotée d’un sexe féminin pour pouvoir prétendre à cette place tant désirée. Après de longs murmures sur l’avenir de Tveit, Terkel décida de nommer son frère cadet – Hagbard – Jarl de Tveit, jusqu’à ce que sa fille soit assez grande pour reprendre le flambeau. Hagbard appliqua la même politique que son aîné, se faisant ainsi respecter sans difficulté. Nonobstant, celui-ci succomba des suites d’une maladie, laissant de nouveau la place de Jarl vacante. Une fois encore, les valdras de Tveit se trouvèrent abandonné, onze années après l’accession au trône de Terkel Strand. Mais les Strand n’avaient aucune intention de laisser une autre famille résider dans cette demeure et régner sur cette région. En effet, Svanhilde Strand était prête. Prête à devenir Jarl. Ambitions & Desseins Les doigts rencontraient la table en bois l’un après l’autre, dans une mélodie peu agréable causée par les ongles de cette main pâle. Ils dansaient avec une lenteur contrôlée et mimait la chute d’une vague prenant naissance dans le large, roulant avec énergie avant de se laisser mourir sur les roches en saignant de l’écume. Ces doigts fins répétaient cette chorégraphie de façon incessante. Ils ne pouvaient s’arrêter, comme si l’élan prit était trop fort pour lutter. « Tu m’écoutes ? Et arrête avec tes doigts, tu sais que je ne supporte pas ça ». Un haussement de sourcil se dessina sur le visage blême de la détentrice de ces doigts perturbateurs. Ces derniers cessèrent leur ballet et s’étirèrent sur le bois doux de la table pendants plusieurs secondes. Elle plongea ses yeux clairs et perçants dans ceux de son interlocuteur, avec un air de défi. Ce dernier lâcha un soupir. « Svanhilde, as-tu pris la peine d’écouter ce que je viens de te dire ? ― Bien sûr, pour qui me prends-tu ? ― Tu as pourtant l’air ailleurs. ― « Malgré l’alliance liant Kaerdum à Heisenk, des raids heisen se font de plus en plus nombreux au nord de Kaerdum, au point que la situation commence à être diplomatiquement tendue entre les deux Royaumes » ― Exactement » Il resta de marbre face à la capacité étonnante de la jeune femme, même si, au fond de lui, il n’arrivait pas à comprendre comment elle s’y prenait pour paraître aussi peu attentive alors que les mots pénétraient dans son esprit où ils finissaient emprisonnés de manière éternelle. Svanhilde – quant à elle – observait la carte de l’Ordanie qui se déployait sous ses yeux clairs et tempétueux. Sans qu’elle ne s’en rende compte, ses doigts reprirent leur ballet et leurs mouvements marins. Cette fois-ci, son interlocuteur abandonna, sachant pertinemment que cette habitude l’emporterait toujours sur ses avertissements. Il aurait bien pu la menacer avec sa hache qu’elle aurait continué à gigoter ces doigts de cette manière qu’il jugeait pourtant si désagréable. « Mon père vieillit et va agir trop tard. ― Se rapprocher de Kaerdum me semble être une mauvaise chose. Une alliance avec Heisenk serait pl… ― Non. On ne peut se permettre de pactiser avec un Roi aussi peu fiable que Thorleif. Ce sont peut-être des Alsderns, mais ils sont souillés par la corruption, le mensonge et la soif de pouvoir. ― Mais… ― Non. Le passé, Arnvald. Heisenk est un Royaume de fourbes. Pour eux les alliances ne sont qu’un gain de temps pour mieux poignarder dans le dos. N’as-tu aucune connaissance de notre histoire ? Ne sais-tu pas que les rois de Heisenk nous ont toujours causé des torts et des guerres ? ― Tu l’as dit toi-même, Svanhilde. Il s’agit du passé. ― Le passé finit toujours par se reproduire si on l’oublie ou le sous-estime. ― Tu fabules. » Les doigts cessèrent leur danse instinctivement avant de se recroqueviller sur la paume à laquelle ils étaient reliés. Svanhilde se leva de sa chaise dans un mouvement brusque et rapide. Et son poing frappa le plat de la table avec force. La douleur résonna dans ses articulations mais elle ne laissa rien paraître. Les traits fermés, le regard sulfureux. La colère grignotait son cœur tandis que l’impatience déferlait dans ses veines. Arnvald observa la jeune femme sans rien dire. Il connaissait ses accès de colère, surtout lorsqu’elle était contrariée. Ils leur arrivaient souvent de se disputer mais leur amitié avait toujours résisté aux remous des vagues provoqués par le tempérament de la jeune Jarl. « La multiplication des raids à Kaerdum est la preuve qu’on ne peut pas faire confiance à ce peuple, quand bien même nos croyances et notre culture sont les mêmes. Je refuse que Valdrek subisse une humiliation semblable à celle de l’an 65 ». Le silence s’instaura dans la pièce. Svanhilde ne quittait pas son interlocuteur des yeux, désireuse de le faire plier. Il devait comprendre les enjeux, réaliser que les conséquences pour le peuple Valdra pouvaient être dramatiques. Catastrophiques. Arnvald s’était muré dans un silence pensif. Les arguments de la jeune Jarl tournaient inlassablement dans son esprit. Il avait un caractère fort, lui aussi, et il ne se laissait pas amadouer si facilement par la volonté de son amie. Cependant, il ne pouvait nier qu’elle avait raison. « Que comptes-tu faire ? Terkel ne semble pas encore décidé. ― Même si je suis à l’autre bout de la capitale, je vais tout faire pour réduire Heisenk à néant. ― Et comment comptes-tu t’y prendre ? ― Je dois rencontrer un de Déréva. » |