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Asgeir Osmoundsson - Jarl de Lahart

Asgeir Osmoundsson
◈ Missives : 5

◈ Âge du Personnage : 41
◈ Alignement : Chaotique Neutre
◈ Race : Valduris
◈ Ethnie : Alsdern
◈ Origine : Cordillère d'Elarn, Jarldom de Lahart, Valdrek Ouest
◈ Localisation sur Rëa : Hjarheln, Lahart, Valdrek Ouest
◈ Magie : Aucune
◈ Lié : Aucun
◈ Fiche personnage : À l'Ouest, Lahart
◈ Crédit Avatar : The King by Pon Wong

Héros
Asgeir Osmoundsson

◈ Sam 24 Juil 2021 - 2:38

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◈ Prénom :  Asgeir
◈ Nom : Osmoundsson
◈ Surnoms : Rundskjold, Le Sans-Bracelet, Survivant du Nord, Jarl du Bras de Valdrek, Le Roi sans couronne.
◈ Sexe : Homme
◈ Âge : 41 hivers
◈ Date de naissance :4e jour de Friest, An 50 de l'ère des Rois
◈ Race : Valduris
◈ Ethnie : Alsderne
◈ Origine : Monts d'Alerme, Lahart, Bras de Valdrek.
◈ Alignement : Chaotique Neutre
◈ Métier : Jarl de Lahart et des contés anexés de Meisen et Dorth.
◈ Crédit avatar : The King by Pon Wong

Magie


Aucune magie


Forces & faiblesses



Forces :


- Guérilla et Cheval de Troie : Le commandement de larges troupes n’est pas du tout la force du Jarl qui ne saurait probablement pas où donner de la tête si l’opportunité lui était donnée cependant, la ruse, la manipulation et les tactiques de guérilla sont la spécialité d’Asgeir. Préférant les petites troupes, voire les missions à dix ou quinze guerriers, il a fait du retournement de situation et du désavantage numérique ses plus grandes armes sur le champ de bataille. « Avec le bon terrain, le bon matériel et la dose de ruse suffisante, aucune guerre n’est perdue d’avance. ».

- Orateur : Quand le Jarl parle, tout le monde l’écoute. Ses discours, ses déclarations ont le don de conquérir toute une assemblée ainsi que de courroucer certains individus. Nul excès de flatterie ou de dispensation d’informations inutiles, mais des mots choisis avec minutie, une gestuelle précise, inspirante et naturelle au personnage, et des traits galvanisants, cinglants ou philosophiques. En d’autres mots : « On aime entendre Asgeir parler, mais on déteste être celui à qui il s’adresse. ».


- Le revers de l’Oryn : Malgré son côté très « à l’aise » de personnage qui aime être au centre de l’attention, Asgeir apprécie en réalité tout autant le calme et la réflexion, voire la méditation, l’apprentissage et la diplomatie que les fêtes endiablées où il reste plus généralement observateur amusé que participant déchaîné. Ses décisions sont souvent justifiées et rarement mauvaises grâce au temps qu’il passe à simuler en son esprit multiples scénarios tous plus tortueux et distordus les uns que les autres jusqu’à trouver le bon, celui qui lui permet d’arriver à ses fins, de régler un problème ou de préserver un équilibre sans jamais laisser les distractions altérer son jugement ou perturber ses pensées.


- Le bout du monde : Le Jarldom de Laharth est le territoire le plus à l’ouest de toute l’Ordanie. Surnommé : « La fin de la terre des hommes » ou « Le bout du Monde » entre autres, il est considéré par une vaste partie de la population de Valdreck comme le dernier endroit avant le monde des Dieux. Ses habitants eux-mêmes entretiennent et propagent, quand ils le peuvent, cette réputation mystérieuse et mystique propre à leurs contrées et restent plus que n’importe où ailleurs dans les territoires Alsdernes, fervents défenseurs des divinités et des anciennes traditions tout en gardant une façon unique d’appliquer les préceptes religieux. Étant également l’un des territoires les plus au nord du continent, Laharth est donc un lieu coupé du monde, coincé entre les plus hauts sommets du nord et l’infinité de la mer et il faut se montrer fort dès la naissance pour y survivre. Asgeir à l’instar beaucoup de ses compatriotes représente le résultat d’une sélection naturelle des plus sévères et ne craint aucune des conditions climatiques qu’il peut croiser plus au sud, la chaleur de Saan Met mise à part.


- Marin et Pillard : Peuple de la mer, les Alsdernes de Laharth ont développé bien des types d’embarcations à travers les âges. La natation, la navigation, de la construction de barques à l’édification de navires de guerre, de l’astrologie à l’apprentissage des nœuds, tous ceux qui arrivent à l’âge adulte ont ces savoirs en leur possession. Les habitants sont souvent sollicités par les Rois Alsdernes pour créer de nouveaux moyen de traverser les océans du globe et survivent d’ailleurs en grande partie grâce à ce travail bien que la pêche et les mines de fer de l’Ouest restent leur source de revenus principale. Depuis la naissance des alliances, leurs activités de pillards s’en trouvent réduites, mais jamais à l’arrêt et leurs incursions se poursuivent à l’encontre de nombreux royaumes, rapides et létales, discrètes et ravageuses.


Faiblesses :

- Connaissances théoriques : Si Asgeir connaît bien des choses sur les autres peuplades, leurs coutumes et leurs religions, cela tient plus de la légende ou des on-dit que de véritables expériences personnelles, car il faut l’admettre, les raids ne sont en aucun cas des situations favorisant les échanges culturels avec les autochtones.


- Cauchemars : La mort est toujours présente aux côtés d’Asgeir. S’immisçant parfois dans ses pensées diurnes, c’est le soir sous forme de rêves atroces qu’elle prend possession de lui. En effet, le Jarl craint le sommeil, car il sait que lorsqu’il s’endort, sa conscience l’accompagne et ne retient plus les démons qu’elle garde habituellement, les laissant ainsi sortir de leurs cages, grignoter de cerveau du valdra.
Asgeir peine à trouver la quiétude dans ses nuits, et ce de manière régulière et bien que l’arrivée de Bryyn dans sa vie commence à changer cela, il n’est pas rare de lui dénicher des cernes noirs sous ses yeux creusés par le manque de repos.


- Indépendantiste : Asgeir est un petit chef. Son territoire s’est peut-être élargi au fil des ans, mais il n’en reste pas moins un vassal du Roi qui ne goûte que peu aux affaires de l’État. Il se plaît à gérer son domaine comme un citoyen normal et organise souvent des referendums où son peuple choisit la loi malgré sa position de pouvoir. Aussi, sa compréhension des enjeux politiques est dérisoire. Il le sait et l’accepte, laissant avec plaisir les joies du pouvoir à d’autres qu’il juge trop cupides ou incapables de résister à la tentation.
La manière dont il a décidé de vivre et les valeurs s’y rattachant font également qu’il entretient généralement un mauvais rapport avec toute forme d’autorité — celle des Dieux mise à part — ainsi que des relations conflictuelles avec les personnes un peu trop dominantes dans leur façon d’être ou leur mode de vie. La distance qui le sépare de la capitale lui permet de réduire au maximum les interactions avec les autres Jarls de Valdreck ainsi qu’avec le souverain lui-même. Aujourd’hui comme depuis toujours, Lahart reste une terre coupée du monde et ses habitants respectent par tradition les chefs locaux bien plus qu’ils ne révèrent le Roi du pays ce qui peut parfois mener à l’affrontement avec la noblesse et les titulaires du pouvoir.


- Paysage Distordu : Si la vue du Jarl a autrefois été plus que correcte, il ne reste aujourd’hui qu’un seul pour lui éviter les ténèbres. Son champ de vision est rétréci et certaines choses échappent donc à son regard de temps à autre. Si Asgeir s’est habitué à vivre avec ce handicap et qu’à force d’entraînement et de patience, il ne semble pas le déranger au quotidien, il est indiscutable que deux yeux valent mieux qu’un. Le valdra a d’ailleurs bien conscience que, malgré la gêne diminuant, il doit rester alerte à tout moment pour tenter de combler cette faiblesse que certains ne manqueront pas de vouloir exploiter.



Compétences




Arts de la guerre

- Maniement d’armes blanches (hache) : maître
= Son essence étant celui de peuples guerriers, il n’est pas surprenant qu’Asgeir ait appris très jeune, à manier les armes. S’il s’était initialement spécialisé dans le maniement de la hache, les champs de bataille du sud lui ont fait comprendre que tout ce qui peut tuer un homme est utile dans un combat.

- Maniement d’armes blanches (épée longue) : expert

- Maniement d’armes blanches (lance) : avancé

- Maniement d’armes de pugilats (dagues) intermédiaire

- Combat à mains nues (lutte)
= "Être désarmé au cours d’un combat peut être fatal à celui qui ne sait utiliser ce que la nature lui a donné." Discours d'Asgeir aux jeunes guerriers d'Hjarheln  

- Parade (bouclier) : maître
= Que serait l’attaque sans une bonne défense. L’un et l’autre sont parfaitement indissociables et le jarl l’a bien saisi.

- Stratégie de combats : intermédiaire / Tactique de guerre (guérilla) : avancé
= Pour gagner la guerre, toute les techniques sont bonnes, même les plus compromettantes. Asgeir n’éprouve guère de remords, à utiliser la ruse ou la manipulation s’il peut vaincre ses adversaires.

- Commandement : avancé
= Le Jarl se retrouverait vite dépassé, s’il devait diriger d’innombrables hommes. Mener un effectif réduit – d’une vingtaine de personnes – est plus à sa portée.  

- Galvanisation : expert
= Quand le Jarl parle, tout le monde l’écoute. Ses discours, ses déclarations ont le don de conquérir toute une assemblée.


Arts de la noblesse & de la bourgeoisie (Métier engagé : Jarl)

- Lecture & écriture : avancé
= Malgré qu’il soit né dans un peuple, dont les traditions sont plus orales, Asgeir, a su, en persévérant sous la tutelle de son père, apprendre à lire et écrire. Même s’il n’a pas la prose des plus grands poètes, il sait retranscrire par des mots ses pensées.

- Mathématique (comptabilité, arithmétique de base) : intermédiaire
= L'éducation de son père et son rôle de jarl le poussèrent à s'intéresser à cette discipline.

- Politique : novice
= Sa connaissance du noble jeu de la cour est dérisoire. Le jarl ne s'en intéresse pas. Il laisse la politique aux cupides.

- Équitation : intermédiaire
= S'il sait chevaucher une monture, pour se rendre à la capitale, l'asdern n'en possède pas une forte maîtrise.

- Diplomatie (Valdrek et Heisenk) : intermédiaire
= Il sait faire preuve de tact, toutefois, sa franchise peut déplaire à certain.

- Navigation : expert
= en tant qu'Alsdern, Asgeir put dès sa tendre jeunesse, être initié  à l'art de la navigation. Plus âgé, il construisit, avec l’aide de la fine fleur des artisans Alsdernes, un navire aux caractéristiques impressionnantes.


Compétences libres

- Religion (Valdrek) : maître
= le duché de Lahart reste fervent défenseur des divinités.  

- Géographie : valdrek (expert),  heisenk (intermédiaire), kaerdum (avancé)
= s'il connaît les monts escarpés, les forêts, les rivières de Valdrek pour y avoir fait de longues escapades dans sa tendre enfance, avec son géniteur, ses connaissances des royaumes voisins sont plus infimes.

- Linguistique : Valdra (expert), Kaerd (avancé), l'heisen (novice)
= Afin d'échanger avec les royaumes voisins, le jarl du apprendre leur dialecte.

- Natation : avancé
= Faisant partie des peuples de la mer, l'alsdern a appris à nager très tôt dans les eaux les plus glaciales du monde connu.

- Éloquence : expert
= La verve du jarl est policée. Ses mots savent toucher le cœur de ses interlocuteurs

- Pistage de la faune : avancé
= Le valdra sait percevoir les infimes traces que laissent les bêtes.

- Survie en milieu sauvage  : expert
= Dès sa prime jeunesse, son géniteur lui enseigna comment trouver sa nourriture, se réchauffer lors des températures extrêmes, trouver un abri, comment réagir face à des bêtes hostiles.  

- Connaissance de la faune et la flore (Valdrek) : avancé
=Une enfance sauvage sur les hauts plateaux des monts valdra avec un père lui enseignant la chasse , la cueillette et tous les autres arts nécessaires à sa survie auront fortement marqué le Jarl

- Artisanat (Forge) : maître
Dès son retour des conflits aux royaumes du sud, Asgeir à tenu à apprendre l’art de donner forme au métal auprès du forgeron local. Désormais propriétaire de sa forge, il est autant le Jarl que l’armurier de la cité d’Hjarheln.
=

-Navigation : expert
=  Les Valdras ne se sentent parfaitement bien qu’en mer car ils la connaissent et l’aiment et savent qu’elle leur rend bien. Aussi bien en solitaire qu’au commandement d’un bâtiment de guerre, Asgeir à apprit à voguer selon les humeurs changeantes de cette force de la nature.

- Escalade : avancé
=  Le valdra n’était pas bien âgé alors que son père lui faisait d’ores et déjà gravir les pentes les plus raides des hauts sommets de la cordillère d’Elarn   


Physique


Les hurlements étaient parvenus jusqu’aux oreilles de pas moins de la moitié d’Hjarheln et certains se pressaient déjà autour de la demeure dont ils provenaient, par inquiétude ou simple curiosité. Le fracas à l’intérieur semblait témoigner d’une lutte violente et, malgré les scénarios peu enviables qui fleurissaient dans l’esprit des citoyens rassemblés devant la scène sans pour autant en comprendre les enjeux, aucun d’entre eux ne se serait risqué à pousser la porte d’entrée, car cette maison leur était connue.
Les pas précipités du Jarl et de sa garde étaient eux aussi couverts par les bruits de cassures, de jets, les chocs et les cris et la petite troupe fendit la foule presque sans attirer l’attention des badauds. Asgeir posa sa main sur la poignée de l’huis et marqua une pause pour essuyer son front un peu moite et rabattre les quelques mèches de ses longs cheveux blonds (presque blancs) en arrière afin qu’ils ne gênent en rien sa vision déjà fortement amoindrie par la perte récente de son œil gauche.
Un dernier regard en direction de son escorte et un hochement de tête pour leur ordonner de s’occuper de la foule grandissante et il rentra seul à l’intérieur.
L’éclairage était pauvre, le soleil passant mal à travers les rares ouvertures dans les murs et le toit. Toutes les bougies du foyer semblaient avoir été éteintes il y a peu et il ne restait que quelques braises rougeoyantes dans l’âtre. Asgeir avançait sur la pointe des pieds, s’agaçait des grincements de la baraque secouée par le vent qui lui faisaient croire à un guet append lors de chacun de ses assauts répétés contre les parois. Le silence avait gagné l’intérieur depuis que le valdra y avait pénétré, aussi prenait-il son temps, ne pouvant compter que sur son œil valide et ses oreilles. Sa large dextre reposait sur la garde de sa dague prête à extraire cette dernière de son confortable fourreau au premier signe de danger. La prudence du Jarl n’était pas exagérée et le moindre faux pas pouvait lui coûter la vie, surtout dans un environnement si sombre.

Dehors, la foule s’était calmée. Tous et toutes, éloignés de quelques pieds de la bâtisse par les soldats en place, attendaient, sans mot dire la suite des événements. Aucun mot ne vint briser ce silence écrasant pendant près de deux minutes et les seules paroles résonnant dans l’atmosphère furent, pendant ce court moment aux allures d’éternité, celle de la mer et des créatures ailées qui annonçaient le retour des pécheurs et de leur pont recouvert de poissons frais aux yeux aussi vitreux que les visages des badauds campant dans un mutisme religieux et chargé d’angoisse étaient sombres.

Soudain un cri de rage déchira l’air, levant au passage la paralysie de l’assemblée. On entendit un grand craquement, puis un second. Le troisième arriva avec la rupture du mur de bois noir sur lequel était plaquée la porte d’entrée. La face rougie par la morsure glaciale de la neige, Asgeir en sortit la tête et se releva et épousseta sa côte de maille tandis qu’une silhouette immense tentait de s’extirper de la maison par la nouvelle ouverture. Les passants reculèrent, rapidement imités par la garde — quoiqu’avec un peu plus de discrétion. Le Jarl soupira à la vue de tant de couardise parmi ses soldats, mais à leur décharge, une grande majorité de guerriers auraient fait de même confrontés au monstre, qui désormais dehors et haches en mains, les fusillait du regard.
Brothun faisait presque sept pieds de haut sur trois de large et ses armes — forgées sur mesure par le Jarl lui-même — étaient comparables à certains enfants du village en termes de taille. Asgeir, du haut de ses exacts 6 pieds, était imposant pour un valdur pourtant, devant cette force de la nature qu’étais le berserk enragé, on lui aurait plus facilement prêté des allures de bambin que de combattant. Cela dit, tous ici savaient qu’il était probablement le seul à Hjarheln à pouvoir tenir tête à Brothun. Sans se démonter, exhibant son calme légendaire et sa patience, Asgeir s’avança de quelques pas vers l’immense valdra comme s’il avait oublié l’affront que ce dernier lui avait fait en l’éjectant de sa demeure à coup de pompe et à travers le mur qui plus est.

- Brothun ! Je comprends que tu sois en colère et je m’excuse d’avoir pénétré chez toi sans autorisation. Je ne veux qu’une seule chose, c’est de parler à Bryyn et Skyari et de voir si elles vont bien. Ensuite, je te laisserais tranquille.

L’immense valdra répondit en commençant par un crachat aux pieds de son seigneur et un regard chargé d’impertinence d’envie de meurtre.

- Et pourquoi elles n’iraient pas bien, hein Monseigneur  ? Va donc t’occuper de ta femme et de ton fils au lieu de venir me parler de ma famille.

Un murmure scandalisé parcouru l’assemblée. Tous ici connaissaient la tragédie qui avait frappé la maison du Jarl quelques mois plus tôt et le simple fait de faire référence aux proches perdus d’Asgeir en sa présence était le plus grand des affronts.
L’insulté n’en tint pour autant pas rigueur, car il savait que cette information n’était pas en possession du berserk et qu’aussi impertinent qu’il ait voulu être, ce dernier ne pouvait se douter d’avoir arrosé de sel une plaie ouverte, le regard gris du valdra masquant sans peine la douleur qui courait pourtant derrière lui.

- Mais j’y compte bien mon ami cependant, je crains de ne pouvoir partir avant d’avoir vu si ta femme et ta fille…

Asgeir n’évita la hache que de quelques centimètres et, le temps d’un battement d’oeil celle-ci se trouvait dans le crâne d’Ube, le tisserand. Un mouvement de panique saisit la foule et tous partirent à grandes enjambées se réfugier chez eux tandis que les gardes tiraient tour à tour leurs lames et s’apprêtaient à faire face au géant avant d’être interrompus par le Jarl.

- Ne bougez pas !

LLes soldats se stoppèrent sans comprendre, mais obéirent. Le berserk avait quant à lui le regard fixé sur la main qui avait instinctivement lancé la hache, les yeux pleins de regret, d’incompréhension et de résignation.

- Éloignez-vous un peu et faites en sorte que personne ne s’approche.

Puis, se retournant vers Brothum :

- C’était l’erreur de trop mon ami… Je crois que je ne peux plus te protéger à présent.

Le berserk éclat d’un rire chargé d’ironie et de mélancolie.

- Asgeir… Je ne suis plus sauvable depuis que la carpette pitoyable qui nous sert de Roi a fait embarquer mes fesses sur la mer pour les royaumes vreëns du sud.

Le Jarl se mordit la lèvre inférieure à la simple pensée du Roi Sven et des conséquences des décisions de ce dernier, laissant couler quelques gouttes de sang qui vinrent teinter d’un rouge cramoisi sa longue barbe grisâtre.

- Je connais parfaitement le sort qui m’est réservé, mais je préfère décider moi-même. Laisse-moi au moins partir en guerrier Rundskjold, sinon c’est l’alcool ou le billot qui m’attendent. On dit que Morgarht n’aime pas les ivrognes et qu’Alstorm renie ceux qui meurent sans tenir une arme.

Attrapant la dernière de ses armes à deux mains, le monstre fondit sur Asgeir avec la force et la rage de dix hommes. Celui-ci esquiva la charge d’une roulade sur le côté et s’empara du bouclier de l’un des soldats avant de dégainer Alftajt : l’épée longue des Jarls de Lahart. L’acier de cette lame était si pur et si parfaitement entretenu qu’aux rayons du soleil, elle semblait prendre un aspect de feu attaché à une garde d’or. Bientôt ce feu se déchaina sur le géant tandis que ce dernier tentait d’arracher la tête de son adversaire d’un coup sec, usant de revers dévastateurs et de coups calculés difficilement prévisibles. En face, le Jarl tenait bon. Poussée par les nombreuses bouffées frigides qui balayaient la côte, sa chevelure argentée s’envolait dans le vent à chaque frappe à la lourdeur écrasante s’abattant sur son égide avec de faux airs de foudre et dont le grondement métalique résonnait jusqu’à la place centrale de la capitale de Lahart. Au bout du manche de son énorme hache, Brothum se déridait tout, en continuant ses assauts, devant l’impassibilité d’Asgeir, qui malgré les secousses qui lui engourdissait les bras, semblait posséder une défense toujours aussi impénétrable que quinze ans auparavant lorsque les deux hommes combattaient dos à dos les hordes Ordhalerons et Vreëns dans le chaos des raids sur les Royaumes du sud. Le géant s’étonna de sourire en se remémorant la guerre. Cette même guerre qui lui avait tout prit. Le sommeil, la joie, l’émerveillement, le courage, la foi et la confiance pour ne les remplacer que par des visions cauchemardesques, des souvenirs douloureux et une rancœur à faire trembler de colère le plus compréhensif des hommes. Mais là, enfin, dans ce combat dont il savait qu’il ne réchapperait pas, il se sentait heureux en constatant toute cette peur et toute cette colère l’abandonner pour le laisser redevenir une ultime fois le jeune soldat fougueux animé par la soif d’aventures et de gloire qui avait quitté son foyer pour le large il y a bien longtemps.
Silencieux, laissant son art parler pour lui-même, Asgeir observait le visage du berserk. Le sourire de Brothum lui faisait mal. Une douleur viscérale, aiguë qui rallumait une fois de plus la haine qu’il gardait en lui à l’égard des politiciens qui les avaient envoyés en enfer, sur des champs de bataille où l’on ne trouve ni honneur ni accomplissement, seulement le désespoir et l’incompréhension.

Une parade de plus : celle de trop qui déséquilibra le berserk et Alfajt s’enfonça profondément dans les côtes du géant valdra comme un coutelas perse une motte de beurre resté au soleil. L’acier dans son buste arracha quelques râles à Brothum et celui-ci tomba à genoux devant le Jarl qui le soutint dans sa chute.

- Haha, tu as toujours été comme ça Asgeir…

- Comme quoi ?

- Peu… peu importe les forces qui s’abattent sur toi, ton bouclier tient toujours le coup. Ça m’a été insupportable lorsque nous sommes rentrés, tu sais… Tu agissais comme si la guerre ne t’avait pas marqué, au point que je me suis mis à douter de t’y avoir vu. Je me demandais en permanence comment tu pouvais continuer… à vivre.

Asgeir ne répondit pas. Le vent souffla et fit une fois de plus voler sa chevelure d’argent ornée de bijoux. D’un coup sec, il retira sa lame du corps de Brothum avant d’allonger ce dernier sur le sol blanc de neige qui déjà, se teintait d’un rouge de mort : sombre et fataliste.

- Dis à Bryyn, que je suis désolé de ne pas lui avoir laissé le plaisir de m’achever.

Le Jarl hocha la tête, un sourire déchiré sur le visage tandis qu’il observait le dernier homme à l’avoir accompagné au cœur du feu des conflits, passer de l’autre côté. Alors que les yeux du géant se ternissaient et que son corps s’alourdissait, le vent redoublait d’intensité comme répondant à la tristesse du valdra, désormais ultime d’une espèce en passe de disparaître à Hjarheln : celle des vétérans de la guerre d’Ivar, le Roi-fou du Nord.

Les gardes pénétrèrent la bâtisse maintenant bancale et en ressortirent bien vite, accompagnant la jeune femme qu’ils y avaient trouvée ainsi que son enfant. Bryyn se figea un instant en voyant la dépouille de son époux étalé dans toute sa longueur sur le sol de neige et, confiant sa fillette à l’un des hommes qui l’escortait, elle se précipita vers ce dernier, empoignant sa dextre de ses deux mains qui semblaient minuscules comparées à celle du berserk. Asgeir se pencha vers elle et repoussa la capuche dont elle était affublée, découvrant une chevelure dorée majestueuse et des yeux d’un bleu de tempête ainsi qu’une marque sombre entourée de rouge sur une joue gauche ayant gonflé de manière évidente. Il désigna blessure du doigt.

- Brothum ?

La jeune femme acquiesça l’air sévère, les sourcils froncés, mais les yeux emplis de tristesse. Elle répondit d’une voix forte, mais tremblante de chagrin.

- Ne vous faites pas de fausses idées mon Jarl. C’était la première fois qu’il levait la main sur moi. Il n’était pas comme ça… Il n’était pas comme ça.

Les larmes se mirent à couler le long de ses joues.

- C’est ma faute. Je lui ai dit que je partais avec Skyari, que je ne pouvais plus l’aider. Qu’il n’aurait… qu’il n’aurait pas dû revenir des royaumes du sud…

Les sanglots de Bryyn se mirent à résonner dans l’air tandis qu’elle enserrait contre son sein le visage inerte de l’homme qu’elle avait aimé et haït. Asgeir se releva le cœur déchiré, ne sachant que dire à la cette veuve dévorée par la culpabilité, le remords et la tristesse. Il fit quelques pas dans la neige vers les gardes et la jeune enfant âgée d’un couple d’hivers seulement, enveloppée dans un drap blanc, et maintenant orpheline d’un père. Il passa une main dans la chevelure naissante du bébé assoupi avant de perdre son regard dans les cieux et les flocons cristallins qui reprenaient leur chute vertigineuse depuis le royaume d’Alta, se demandant quand, enfin, les retombées du conflit cesseraient-elles de briser des existences, de marquer des vies.

"2nd Astar de Siralon, an 78 de l’ère des Rois."


Caractère


Sa pupille grise scrutait le fin ouvrage de bois dispendieux et métal précieux dans lequel reposait le même alcool qui imbibait le bas de sa grande barbe couleur de nuage, laissant le respect et l’appréciation conquérir son visage, habituellement si sombre à ce genre d’événements, dévoilant aux rares yeux qui se fixaient sur sa personne attester en secret de la possibilité qu’un sourire n’arrive un jour sur la face d’un être en apparence indifférent au monde lui-même. Quelque part, au fond de lui, il se savait observé — nonobstant le profond égarement dans lequel il s’était perdu — et peut-être était-ce cela qui le tirait fréquemment de ses contemplations pour risquer un regard méfiant sur le paysage alentour.
Derrière la coupe qu’il tenait dans sa main droite à hauteur de sourcil, il discernait la cohue, les bagarres, les danses, les ronds de jambe comme les révérences honnêtes, les courbettes maladroites, l’assurance volée, autant de choses qui ouvrirent, de nouveau, la porte de ses oreilles au son. Un léger rictus s’installa sur son visage alors qu’il revenait à la réalité à coups d’odeurs d’alcool et de viandes, de mélodies et rythmes à faire entrer Alstrom lui-même dans ce grand hall déjà bondé, et de la finesse du vin qui coulait dans sa gorge. L’assise à sa droite sortit soudain de son champ de vision, le poussant à tourner sobrement la tête afin de résoudre le mystère derrière cette abrupte disparition juste à temps pour reconnaître les contours de la jeune femme qui s’prenait place à ses côtés et l’invitait à avorter son mouvement rotatif pour, de nouveau, concentrer son œil valide sur les festivités, sa curiosité satisfaite.

- Ma Reine…

Les mots sortirent de sa bouche par obligation et il ne put s’empêcher de remarquer l’engourdissement de sa mâchoire ainsi que la manière dont ses lèvres étaient restées partiellement collées durant cette courte prise de parole, alourdies et empâtées par le manque d’exercice, rendant sa diction quelque peu approximative. Telle était souvent la sonorité de ses vocables en début de conversation.

-  Jarl Osmoundson, je ne m’attendais pas à vous voir en ces lieux.

La voix était claire et l’intonation point hostile, cependant ce simple trait annonçait moult questions auxquelles ledit Jarl ne souhaitait pas particulièrement avoir à répondre. Asgeir soupira devant la perspective d’un long et stratégique échange verbal, mais, un minimum respectueux, il répliqua poliment quoiqu’avec une malice similaire.

- Ne vous moquez pas de moi « Princesse ». La douce saison offre chaque année de nouvelles perspectives au voyage. Vous avez été sage d’ordonner ce rassemblement en une telle période : il aurait été compliqué pour n’importe lequel de vos sujets de se soustraire à ses responsabilités sans un prétexte des plus convainquant.

Svanhilde ne releva pas l’appellation qui, pourtant, lui déplaisait et acquiesça d’un signe de tête.

- Il serait, en effet, fâcheux qu’il manque un trop grand nombre de Jarl pour célébrer mon intronisation. Certains pourraient y voir quelque sorte de réticence chez les absents ce qui, étant donné ma position, me forcerait à visiter lesdits individus pour leur faire connaître ma vision des choses.

La jeune femme laissa intentionnellement passer quelques secondes afin d’observer la réaction de son interlocuteur dont le comportement ne changea guère, les yeux toujours détournés du visage couronné.

- À ce propos… Je n’ai croisé ni le Jarl Björn ni le Jarl Alstein durant les festivités. J’aurais pensé que vous voyageriez ensemble.

Le corps du quarantenaire se raidit un instant avant que, dans une inspiration lourde de résignation traduisant parfaitement le peu d’envie qu’il eût de devoir tenir cette conversation, il ne plonge la dernière de ses orbes grisâtres dans les mires aux couleurs de mer agitée de la reine nouvelle.

- Eh bien… Disons simplement que leurs responsabilités m’ont été déléguées et que, pour ce soir, je suis le représentant de l’ensemble du « Bras de Vladrek », ne vous en déplaise ma Dame.

Le regard de Svanhilde changea pour concorder avec le ton sérieux que prenait la conversation et en même temps, elle s’approchait du visage du Jarl afin que leurs voix ne s’élèvent trop.

- Et si cela me déplait ? dit-elle sèchement quoique sans colère et avec un caractère plus calme que le valdra ne l’avait prévu.

Asgeir se redressa vivement sur son assise et, avec une indignation certaine, bien que rapidement réprimée, reposa son gobelet sur la grande table de bois sombre qui lui faisait face. Sa voix se fit plus forte, mais pas suffisamment pour capter l’attention des convives. La discussion venait de prendre une tournure plus tumultueuse, le Jarl le comprenait. Mais il savait également que l’histoire qu’il était à présent obligé de conter à la jeune souveraine aurait pu être évitée si la royauté avait daigné prêter oreille à ses dires.

- Ne faites pas celle qui ne sait rien Strand… lâcha-t-il finalement, plein de dépit. Cela fait des années voir des décennies que cela pend au nez de votre père et par droit de succession au vôtre. Malheureusement, jusqu’ici, jamais Terkel ne consentit à tenir compte de mes avertissements.

Son corps soudainement crispé se détendit bien vite et le dos d’Asgeir épousa de nouveau le l’appui de son assise.

- Peut-être avait-il compris la situation et prévu les résultats que nous observons aujourd’hui et cela l’arrangeait -il, qui peut le dire ? L’esprit de votre père n’a jamais été des plus simples à déchiffrer.

Il avait prononcé cette dernière phrase avec nettement moins d’agressivité et plus de lassitude que les premières. La nostalgie s’était emparée de lui au fur et à mesure de son discours et la reine décela une pointe d’amertume dans une mer de tristesse en perdant son regard au-delà des mots du quadragénaire.

- Que c’est-il passé Asgeir ?

Le Jarl s’interrompit quelques secondes et entreprit de remplir de nouveau sa coupe, mais trouva l’amphore vide. Agacé, il la reposa sans douceur sur la table et enchaîna, le visage sombre, la voix grave.

- Les Jarldoms de Maeth et Gywnah ont été annexés par Lahart après l’échec de leur tentative de coup d’État. J’ai nommé de nouveaux dirigeants à leur tête : des hommes de confiance qui ont juré allégeance à la Terre des Dieux et à son peuple. Les anciens Jarls ont tous deux traversé de l’autre côté. Björn à périt sous ma lame suite à sa demande de duel lors de son procès et Alstein quant à lui, m’a été livré par ses propres gens quelques jours après sa défaite et été offert en sacrifice à Elysea au cours du grand Blot de la semaine passée afin de nous garantir son soutient pour les récoltes de l’année à venir. Puisse Morgarht prendre soin de leurs âmes en son royaume.

Svanhilde demeura bouche bée pendant quelques secondes, les yeux fixés sur le visage de son vassal, son cerveau tentant tant bien que mal d’intégrer toutes les conséquences qu’un pareil événement pourrait avoir sur le pays dans son intégralité. Sans un bruit, elle laissa enfin la paume de sa main s’aplatir sur son front tandis que ses iris restaient emplis de confusion, bloqués sur le sol.

- Rundskjold…

À l’appel de son surnom, le Jarl posa pour la première fois toute son attention sur son interlocutrice. Svanhilde s’adressait au guerrier, à l’homme qui était revenu du chaos des raids contre les royaumes du sud du continent, à celui qui avait vu le feu des ordahlerons et qui subsistait pour le décrire aux vivants. L’échange de regards dura quelques secondes sans plus et aucun mot ne vint s’ajouter, former une phrase ou préciser la pensée de la couronnée. Asgeir acquiesça en s’inclinant légèrement vers la souveraine qui hocha la tête en retour avant de se lever et d’aller se mêler au autres invités.
Lui restait là, l’observant s’éloigner tandis qu’au même moment passait un esclave portant vin et hydromel qu’il héla d’un signe de main avant de contempler le doux liquide remplir son verre et d’envoyer le serviteur lui trouver une nouvelle amphore. Tout en reprenant sa scrutation des danses des ombres de flamme et d’hommes sur les murs du grand hall, il repensait aux yeux de la jeune femme lorsqu’elle l’avait appelé et sourit. Un sourire soulagé teinté de surprise, car par delà ses iris, il avait discerné bien des choses. L’autorité d’un souverain, la compassion et la loyauté d’une amie et la confidentialité d’une alliée.

Habituellement mal à l’aise avec les représentants du pouvoir, le valdra conclut, de manière aussi discrète qu’affectueuse, tout en jetant un dernier regard à la tête couronnée maintenant en grande discussion avec les autres invités :

- Merci, jeune reine.

Svanhilde passerait cette affaire sous silence si aucune âme vivant au-delà du bras de Valdreck n’avait vent de la prise de l’emprise d’Asgeir sur ce dernier. Les autres Jarls devaient être maintenus dans l’ignorance ou bien les luttes de pouvoir commenceraient à fleurir çà et là, rouges comme le sang qu’elles feraient couler dans le royaume du nord où les seuls pétales jonchant le sol sont, la plupart du temps, tout de glace de blanc.

"Couronnement de la nouvelle Reine de Valdrek : Svanhilde Strand, fille de Terkel Strand, an 91 de l’ère des Rois."



Inventaire



Les titres et les rangs ne sont que bien peu de chose sur les contrées oubliées des hommes où le berger est tout autant utile à la communauté que le forgeur ou le stratège et non moins capable de prouesses au combat. Malgré sa position de Seigneur des terres de l’ouest : du « Bras de Vladrek » Asgeir n’est donc pas le propriétaire d’un grand nombre de biens. La plupart du temps forgeron et marin, ses principales propriétés sont donc son navire et sa forge ainsi que les équipements l’accompagnant, une chambre étroite aménagée à l’étage du grand hall du Jarl dans laquelle il ne dort pas souvent, un petit coffret de bronze à l’intérieur duquel il conserve ses économies et les souvenirs de ses raids et, enfin, quelques atours très subtilement ornés qu’ils ne portent que peu et auxquels il préfère de simples vêtements, peu gracieux, mais chauds et résistants. Seuls quelques rares objets restent chers à son cœur.

Tout d’abord sont navire : Skelräed. Un grand bâtiment pour les standards nordiques. Pouvant employer près d’une soixantaine de rameurs et possédant une large cale à remplir de butin pour chacune de ses sorties et mer. La figure de proue fait hommage à Morghart : un vieil homme courbé, s’appuyant sur un bâton d’if, les yeux bandés, mais la tête haute, semblant, lorsque la nuit tombe, observer les astres lointains. Il s’agit du seul de ses objets précieux qu’il ne porte pas la plupart du temps sur lui. Il a été créé sur demande et en collaboration avec Asgeir par les plus grands charpentiers Alsdernes dans le but de rivaliser avec les bâtiments ordhalerons : leur savoir-faire ancestral se combinant avec l’expérience personnelle du Jarl pour donner naissance à ce navire monstrueusement rapide et stable.

- 30 bancs de chaque côté
- Une cale de près de 25 tonnes en capacité de chargement.
- Une voilette en haut de mât ajouté à la grand-voile colorée traditionnelle.
- Système à quille et gouvernail à l’arrière pour plus de protection.
- Une vitesse de pointe de presque 15 nœuds à la voile et 8 à la rame.


Le Skelräed tranche avec les autres navires Alsdernes, mais ses résultats sont également sans précédent. Asgeir est convaincu qu’à l’avenir toutes les flottes du nord utiliseront ces innovations même si les contraintes matérielles en empêchent la production régulière.

Viennent ensuite un collier et un bracelet. Le collier fait d’argent extrait des monts à l’est de la ville, gravé de symboles que seule la défunte compagne du Jarl savait déchiffrer et seul souvenir qu’il lui reste d’elle. Le bracelet lui, appartenait à son fils que les eaux glacées ont emporté il y a de nombreux hivers de cela. Il les porte toujours, cachés du regard des autres sous ses vêtements.

Enfin, ses armes et outils. La ceinture d’Asgeir a été faite sur mesure et sur commande du Jarl. Comprenant de nombreuses accroches et pochettes dont chacune à son utilité. Dans l’ordre de gauche à droite : Alftajt : Une épée longue à la lame forgée par les nains d’un acier inconnu des hommes du nord. Il s’agit d’un cadeau dont les raisons ont été perdues dans le temps. Elle se transmet de Jarl en Jarl et est symbole d’autorité considéré comme un trésor valdra.
Viennent ensuite une hache et deux dagues forgées par Asgeir lui-même. L’acier et le bois proviennent tous deux de sa montagne natale.
À leur droite, on trouve trois pochettes servant pour (dans l’ordre) les herbes, les osselets de prémonition et les pièces de monnaie.
Enfin quelques accroches afin d’ajouter, si besoin, du matériel d’escalade, des outils ou une pochette supplémentaire.





Ambitions & Desseins


Reigner du mieux qu'il peut sur les siens, retrouver le goût de la vie, essayer de nouveau d'être un père et devenir un vrai guerrier quoi que cela veuille dire...



Divers


Reconnaissez-vous être âgé d'au moins 18 ans ? : Il parrait
Moultipass : validé par Lorel

+ ENFIN le TC !!!! Bon toutes mes excuses pour la longueur du truc mais j'en avais besoin. Et puis bon 1 fiche par an ça va non ? Hein ? Alleeeeez :3


Asgeir Osmoundsson
◈ Missives : 5

◈ Âge du Personnage : 41
◈ Alignement : Chaotique Neutre
◈ Race : Valduris
◈ Ethnie : Alsdern
◈ Origine : Cordillère d'Elarn, Jarldom de Lahart, Valdrek Ouest
◈ Localisation sur Rëa : Hjarheln, Lahart, Valdrek Ouest
◈ Magie : Aucune
◈ Lié : Aucun
◈ Fiche personnage : À l'Ouest, Lahart
◈ Crédit Avatar : The King by Pon Wong

Héros
Asgeir Osmoundsson

◈ Sam 24 Juil 2021 - 2:39

Histoire


« Le soleil pâle du début de matinée dépassait à peine la cordillère d’Elarn et commençait seulement à arracher la ville, depuis bien des heures éveillée, à l’ombre gigantesque qui semblait déterminée à vouloir la maintenir dans la nuit. Sur les docks, les marins revenus, écaillant les poissons, ainsi que quelques esclaves transportant caisses et matériel stoppèrent un instant leurs activités pour apprécier l’arrivée de l’astre du jour dont la lumière projetée gagnait en terrain sur le visage des habitants à chaque minute s’écoulant, faisant enfin ressortir les teintes des vêtements portés, des voiles des navires amarrés , des bannières aux couleurs du Jarl soigneusement disposées aux quatre coins de la cité afin que pas un étranger de passage ne puisse les manquer en pénétrant les portes massives qui marquaient l’entrée d’ Hjarheln : capitale du Jarldom de Lahart.
La fumée des forges s’élevait haut dans le ciel et le son des métaux s’entrechoquant parvenait jusqu’à mes oreilles. De part et d’autre des palissades, on pouvait observer l’agitation grandissante, la population se regroupant de plus en plus clairement vers les étals du marché situés entre les quais et la place centrale, les malchanceux devant déblayer le toit ou la face de leur demeure recouverte par la neige, les promeneurs hasardeux, trop pauvres ou trop riches pour arpenter les halles, badauds hébétés aux joues creuses et au regard bas frappant de leurs bottes les mêmes allées que leurs rivaux : arrogants pompeux aux apparats clinquants et aux mines satisfaites.

Détournés du chemin devant moi par l’apparition de la lumière aveuglante du soleil, mes iris restaient maintenant accrochés à la ville à la fois immense et minuscule depuis le plateau intermédiaire de la montagne, nourrissant mon esprit de questions dont je devais supposer les réponses, car les moyens me manquaient pour acquérir le savoir. Le menton collé à l’épaule, l’œil exposé aux rayonnements légèrement plissé, je m’amusais, dans cet instant de perdition, à imaginer le fonctionnement de cette entité tout comme celui des individus la composant et lui donnant vie. Quand soudain, une voix grave provenant d’un peu plus haut me fit revenir à la réalité, captant de nouveau toute mon attention, actionnant d’un simple appel mes jeunes jambes qui aussitôt se remirent à me porter toujours plus vers le sommet tandis que mes yeux se fronçaient de plus belle afin de minimiser l’impact de la réflexion des l'aura dorée de l'astre du jour sur la neige.
Père avait continué de progresser sans moi sur plusieurs dizaines de pieds sans remarquer mon égarement jusqu’à ce que, sûrement, l’absence du son de mes bottes écrasant la poudreuse ne l’alerte. Sa silhouette se tenait maintenant en amont et la forte luminosité m’empêchait de juger correctement de la distance nous séparant. Je forçais donc l'allure soucieux de le faire attendre, gardant cependant dans un coin de ma tête la nature traître du terrain, conscient qu’un faux pas pouvait entraîner vers la mort sur ces versants escarpés recouverts de neige. Arrivant enfin à sa hauteur, il me lança d’une voix posée tachetée tant de complicité que de reproches :

- Ton esprit se perd fils.

Sa dextre, large, pareille à une planche de bois vint se poser sur mon épaule d’enfant.

- Si nous nous hâtons, nous passeront l’après-midi en ville, mais pour l’instant, reste concentré. La montagne seule requière ton attention pour le moment. Sois donc prudent, car elle peut se montrer jalouse. Ne lui donne pas l’occasion de te le faire découvrir.

- Pardon père.

Osmound hocha la tête et sourit derrière son imposante moustache puis se retourna et m’emboîta le pas à travers la grande montée menant au plateau supérieur. Cette dernière était pentue. Si pentue que les conifères y poussant semblaient parfois être à l’horizontale et qu’il était impensable de tenter l’ascension sans connaître la route précise à emprunter, à quels arbres s’accrocher, ou encore à quel endroit il était possible de planter un piolet. En mentor sévère, père me regardait du coin de l’œil alors que, comme chaque Ellsya, je grimpais selon les routes et les codes qu’il m’avait appris, cet obstacle d’apparence insurmontable qui avait, au fil des années, coûté la vie à plus d’un impétueux. Et comme chaque semaine, il reculait l’instant où il me jetait une corde pour que je m’y attache et finisse l’ascension hissé par ses bras robustes jusqu’au plateau.
Je voyais, dans cette aide toujours plus tardive, une récompense, un accomplissement, quelque chose dont je pouvais être fier et que je tiendrais en moi pour le restant de ma vie, c’est pourquoi, malgré la fatigue, malgré le danger évident et la mort qu’il annonçait, je ne pouvais m’empêcher de me sentir renversé par une vague de déception lorsque le cordage finissait par apparaître devant mes yeux avec, à son extrémité, un sourire rassurant qui répétait toujours la même phrase : « Tu en as assez fait pour aujourd’hui ».
Cependant, l’arrivée au plateau supérieur de la montagne me faisait rapidement oublier ce sentiment, et bien qu’il n’était pas si rare que je voie ces paysages, la sensation incomparable d’être posé sur le toit du monde restait toujours aussi jouissive. Derrière nous, le pic, immense, solitaire, demeurant inatteignable, aussi lointain depuis notre perchoir que depuis la base de la montagne, la tête perdue dans des nuages que seuls les dieux devaient toucher. Autour et devant, l’océan, bleu et noir, faisant passer dans son infinité, la montagne pour une simple pierre. Forçant, chez celui qui le regardait, une admiration sans limites. Exigeant de la part de tout — excepté peut-être des cieux — une humilité des plus sincères.
Du haut de mes onze années de vie, je n’aimais point que l’on me trouve faible et tremblais d’impatience de faire mes preuves, de prouver au monde de quoi j’étais réellement capable quitte à me faire passer pour plus fort que je ne l’étais. Mais que les dieux m’en soient témoins, je n’ai jamais versé tant de larmes que devant cette magnificence et père ne manquait pas de me moquer sans retenue lorsque cela arrivait. Malgré tout, je savais qu’il comprenait, qu’il était passé par là et que, comme moi, il avait ressenti ce sentiment que tout homme, toute femme et toute créature du monde devrait ressentir au moins un jour au cours de son existence : celui de n’être rien ; car il amène à la liberté.

Nous restions toujours près d’une demi-heure là-haut, à observer le monde, à tenter d’en saisir le fonctionnement. Père me demandait de trouver et de décrire les différences entre le paysage sous nos yeux et celui qui nous avait été présenté lors de notre montée précédente, me poussant à remarquer le moindre détail repérable, à m’habituer aux changements et à leurs importances. Car la descente se faisait par l’emprunt d’un chemin bien plus praticable utilisé lors de l’ascension par la plupart des pèlerins voulant se rendre jusqu’au plateau supérieur et le chemin du retour, bien plus calme donc, était constamment rythmé par les questions m’interrogeant sur l’importance de la chute du grand sapin du versant ouest, me demandant pourquoi l’épaississement de la couche de neige sur le plateau inférieur pouvait être préoccupante, ou combien, au vu des empreintes laissées dans la neige, la meute de loups qui vivait dans ces monts depuis maintenant des générations, avait eu de louveteaux cette année.
L’arrivée au plateau inférieur signait la fin de cet échange et j’étais souvent envoyé à la source de l’Epner : la rivière qui traversait la montagne et alimentait constamment en eau pure des hauteurs plus de la moitié des puits de la région, pour faire le plein d’eau. Les outres, une fois remplies, pesaient généralement assez lourdement sur mon dos déjà endolori par la grimpe matinale, mais père en avait parfaitement conscience et chaque tâche qu’il me confiait servait toujours un but précis qui était souvent celui de m’endurcir ou de m’instruire.

C’est donc les bras chargés sous le zénith d’Elias que nous franchissions les portes de la capitale de la région. Les gardes nous repéraient toujours très vite et à peine quelques pas après les portes nous en avions deux pour nous escorter à la maison du Jarl. Le regard de la population planait sur nous dans chaque avenue jusque dans la plus petite des ruelles de la grande ville, car tous connaissaient « Osmund-le-sans-nom », « Osmound-le-sans-bracelet », « Berserker des Monts », « Champion de Myra », « Favori d’Alta », « Cauchemar des Royaumes du sud », et, lorsqu’il traversait la grande Hjarlen comme un navire de guerre fend les vagues, tous savaient qu’il n’avait volé aucun de ces surnoms. Je connaissais moi-même toutes les histoires glorieuses qui les lui avait octroyés, mais aucune d’entre elles n’éveillaient chez moi un quelconque sentiment, l’envie de voyage mise à part. Car Père me l’avait souvent répété : « La gloire est un piège mon fils. Le plus doux, le plus savoureux et le plus pernicieux des alcools. Souviens-toi : se détacher de l’admiration d’autrui est la tâche la plus ardue de tout grand guerrier. Cependant, seul celui qui s’y attèle peut aspirer au bonheur et à la reconnaissance des Dieux ».

Lorsque tous ces gens regardaient Osmound, ils voyaient un guerrier redoutable, une force de la nature auxquels les gardes qui l’accompagnaient, pourtant bien bâtis, devaient rendre près d’une vingtaine de centimètres. Je ne voyais que mon père. Mon univers, mon mentor, ma famille. Il était, aujourd’hui, la voie que je voulais suivre et sa réticence à aborder le passé et plus globalement sa vie avant ma naissance, était pour moi comme un avertissement, une mise en garde contre les travers de l’homme. Je ne demandais rien. Mon idéal était devant moi et m’enseignait lui-même la façon de l’atteindre. Les erreurs qu’il avait faites en chemin ne m’intéressaient pas et je me contentais de suivre docilement ses préceptes et ses codes, la certitude que cela serait suffisant ancrée dans mon cœur.

Après quelques minutes de marches, le grand hall du Jarl s’offrait à nous. De loin la bâtisse la plus imposante de la ville tant en hauteur et en largeur qu’en luxuriance. Le bois sombre dans lequel avaient été sculptées ses poutres provenait des conifères imposants et centenaires du plateau supérieur. Il était déjà très compliqué de ramener ne serait-ce qu’un seul de ces arbres du haut de la montagne et ce dernier se vendait généralement à prix d’or, mais ici, dans cette immense salle du trône, je ne pouvais compter combien d’entre eux avaient été nécessaires à la construction de ce bâtiment. À gauche et à droite, des tables, des bancs. Au centre, un âtre, immense. Et au-delà, un trône d’ivoire de baleine et d’argent gravé de runes à la gloire d’Elysea. Vide. Grandiosement vide, comme si, peu importe qui elle était, la personne destinée à poser son séant entre ces accoudoirs semblerait toujours décevante, inadéquate, ternissant l’éclat de cette véritable œuvre d’art qui désignait par son propriétaire, la personne au pouvoir.

Enfin, après une courte attente, un bruit de pas léger venant de l’arrière-salle, s’approchant à faible allure, parvint jusqu’à mes oreilles. Au moment même où je le notifiais, père s’était déjà incliné bien bas, un genou à terre et, dans l’empressement, je l’imitais maladroitement, adoptant une posture similaire, quoique visiblement plus bancale.
Alors que l’on nous invectivait de relever la tête, je découvrais un visage connu. Ealfrid, la femme du Jarl actuel, fille de Thormound, le précédent Jarl de Lahart : un guerrier tel qu’à peine passé dans l’autre monde, ses triomphes commençaient déjà à résonner dans les oreilles de tous, chantés haut et fort par les bardes qui l'assimilaient aux Rois semi-légendaires d’un autre temps au rythme des tambours, portés par les mélodies des cornes. Sa fille aînée et seule survivante de sa fratrie n’était pas moins révérée. Porteuse de bouclier exceptionnelle, elle était, selon les anciens de la région, la guerrière la plus habile et la dirigeante la plus juste que Hjarlheln avait pu connaître au cours des derniers siècles et, bien qu'entourée d'un peuple très conservateur et, dans un premier temps, ancrés dans un refus catégorique de voir une femme accéder au plus haut rang de pouvoir de la région, tous avaient bien vite été forcés de constater que les qualités de gestion d'Ealfrid n'avaient pas leur pareil dans l'ouest du pays. J’étais toujours subjugué par son charisme et sa grande beauté lorsqu’une fois le mois, nous la rencontrions dans son imposante demeure.

- Osmound, je suis ravie de vous revoir. Mais je regrette que vous ne me visitiez point plus souvent… Ma compagnie vous est-elle si désagréable pour que vous ne veniez que lorsque vous y êtes forcé ?

Mon père était loin d’être la personne la plus loquace que j’ai rencontrée. Aussi, j’avais pris l’habitude de toujours disséquer ses paroles lorsqu’il se lançait dans une conversation. Il était toujours un peu enroué dans les premières minutes et cela ajouté à sa voix naturellement rauque, lui donnait plus que jamais, un air d’ours à l’apparence humaine.

- Madame, votre présence illuminerait la journée de n’importe quel homme cependant, vous savez comme moi que la ville n’est pas mon terrain de prédilection. Or, pour vous voir, il nous faut la traverser.

Ealfrid était l’un des rares personnages à pouvoir faire sourire Osmound, les autres (à ma connaissance) étant Fradyhn le vieux pêcheur ainsi que moi-même. Je ne connaissais pas grand-chose de leur histoire commune. Simplement ce que Père avait bien voulu m’en dire. Je savais qu’ils se connaissaient depuis l’enfance, qu’ils avaient grandi et guerroyé ensemble et qu’elle était celle qui lui avait proposé notre demeure à Père lorsqu’il s’était retiré de l’armée.
On aurait dit qu’ils se connaissaient au-delà des rencontres protocolaires, qu’ils avaient tant à se dire qu’ils pourraient parler des heures. Et moi, seul témoin de leur complicité, j’observais, le visage souriant, le cœur serré, sans trop comprendre, sans trop savoir.

Pourtant, l’entrevue tourna court et après quelques courtes minutes, Père s’avança et tendit à la Jarl une bourse regroupant le montant des taxes de l’année dont il devait acquitter. Avec une moue pleine de contrariété, Ealfrid fit quelques pas et s’empara de l’argent sans un mot. Après quoi, un bref mais solennel salut et nous étions sur le chemin de la sortie.

- Asgeir !

La voix me fit un instant sursauter puis je me retournais, pour connaître la raison de cette interpellation. Près de son trône, me faisant face, la Jarl me regardait dans les yeux, le visage hésitant. Emplis de doute, ne sachant que faire, je me retournais vers mon père afin d’avoir de sa part, quelques conseils ou directives cependant, ce dernier ne s’était pas arrêté de marcher et continuais de progresser vers la sortie sans se retourner comme si le son de la voix d’Ealfrid, pourtant forte, s’était égaré sur le chemin de ses oreilles. Perdu, pataugeant dans une certaine incompréhension, je me retournais de nouveau vers cette dernière et ne pus m’empêcher de notifier le regain de calme et de sérénité qui s’était opéré sur son visage. Une douleur visible restait néanmoins affichée.

- Prends soin de toi mon enfant, ajouta-t-elle simplement.

Je ne trouvais comme réponse que de m’incliner en la remerciant et lorsque je relevais les yeux, ses lèvres souriantes conclurent avec un sarcasme mêlé d’une petite dose de sérieux :

- Et prends soin de lui aussi.

Le front face au sol, mes yeux s’écarquillèrent et mes poings se serrèrent un instant. Moi ? Prendre soin de mon père ? Avais-je seulement le plus infime moyen de parvenir à protéger une telle force de la nature ?
Devant mon silence, elle laissa échapper un petit rire cristallin et, comme si elle avait deviné mes pensées, elle me dit après s’être approchée de quelques pas, plus bas et avec une complicité similaire à celle qu’elle entretenais avec Osmound :

- L’esprit aussi a besoin de protection et de tendresse. »


- Cette phrase résonne toujours dans mes oreilles, soupira Asgeir. Il s’est pourtant écoulé bien des années avant que je n’en comprenne pleinement le sens.

Bryyn, dont le crâne délicat reposait sur le ventre du Jarl, sourit un instant avant que la compassion et l’inquiétude ne reprennent le dessus et laissa ses doigts traîner sur le torse d’Asgeir.

- Chaque soir, j’en apprends un peu plus sur toi, lança-t-elle d’une voix faible teintée de mélancolie. Pourtant, tu ne distribues les histoires qu’au compte goutte… Pourquoi as-tu mis tant de temps pour me parler enfin de ton père ?

Au fil de ses mots, Asgeir planta son œil valide dans les flammes déchaînées de l’âtre et se posa la question à lui-même. Il ne se demandait ce genre de chose qu’au contact de la jeune femme, les interrogations de cette dernière faisant écho aux parts enfouies et étouffées de son amant. De ce fait, chacune de leurs longues discussions nocturnes les rendait un peu plus inséparables, les forçant à s’explorer, se comprendre, à s’accepter. Il en résultait pour Asgeir - habituellement peu expansif- l’envie de faire preuve d’une honnêteté sans limites et les réponses qu’il pouvait donner venaient la plupart du temps du cœur, dépourvues de filtres ou d’ornement. La vérité était tout ce qu’il souhaitait s’entendre dire.
Un doux silence s’installa, mais il se vit brisé en quelques instants.

- Mon père… hésita Asgeir. Mon père a tant de temps été synonyme de monde pour moi que l’évoquer signifie déterrer toute une enfance de questions. Sa présence rassurante m’empêchait de penser à tout ce qui aurait pu m’atteindre durant l’enfance. Pourquoi ne vivions-nous pas en ville ? Pourquoi n’avais-je pas de mère ? Pourquoi n’avais-je pas d’amis avec lesquels jouer ? Pourquoi apprenais-je tant et tant de compétences normalement réservées aux adultes ? Qui était-il ? Tant de questions qui restaient enfouies, cachées dans son immense ombre protectrice et qui commencèrent à me grignoter à petit feu dès lors de sa disparition.

- Cependant tu en sais plus que jamais aujourd’hui ! rétorqua Bryyn. Je comprends que tu ais la sensation d’avoir laissé passer ta chance de lui demander tout cela en personne cependant… Tu ne peux pas continuer à courir après un fantôme Asgeir ! Pas de cette façon-là en tout cas. Tu oublies de vivre ta propre vie à force de vouloir déterrer celle d’Osmound.

La douleur se ressentait de plus en plus au fur et à mesure que les phrases s’enchaînaient.

- Parle-moi ! N’y a-t-il rien que je puisse faire pour te soulager de tes ombres comme tu m’as délivré des miennes ? Suis-je condamnée à devoir observer ton esprit mourir à petit feu, impuissante ? Je suis là Asgeir ! Alors, raconte-moi tout, ne passe rien sous silence ! Je veux tout savoir ! Je veux savoir… J’ai besoin de savoir comment le monde t’a construit pour pouvoir te réparer. Mais les éléments auxquels tu me donnes accès mettent trop de temps à franchir le palier de tes lèvres et pendant ce temps, tu décrépis ! Je ne suis pas dupe comme les gens de ta cour ou les passants dans la rue, je vois ce qui t’arrive… Alors arrête de me traiter comme si j’étais, moi aussi, aveugle à ta souffrance…

C’était la première fois qu’elle s’emportait ainsi. Lui, restait un moment bouche bée devant cette explosion soudaine avant de se reprendre.

- Tu ne …

Il s’arrêta. Les mots allaient lui échapper et ils auraient fait mal, il le savait. La grande inspiration qui suivit lui redonna tout son calme et il se demanda : « Après tout, pourquoi pas ? ».

- Ealfrid était ma mère, Bryyn.

Le silence revint un instant de nouveau puis elle répondit après s’être rallongée à ses côtés.

- Je l’avais compris à la manière dont tu parlais d’elle. Tu avais du mal à masquer ton sourire lorsque tu m’as décrit cette visite au grand Hall.

Elle déglutit lentement.

- Comment l’as-tu appris ?

Asgeir dirigea son regard vers la jeune femme dont la tête reposait sur son épaule.

- Après sa mort et celle de mon père, j’ai vécu reclus dans notre maison, à l’écart de la ville. En fouillant les affaires pour décider desquelles accompagneraient père dans l’autre monde, je suis tombé sur un livre épais comme une bûche, remplit de croquis et de textes en runes valdras traditionnelles.

- Les récits d’Osmound ?

Il acquiesça légèrement.

- Tu imagines sans peine ma surprise. Combien de personnes dans cette ville sont seulement capables d'écrire une simple lettre ? Et pourtant, on aurait dit que toute sa vie y était consignée. Chaque événement majeur ou non de ses quarante dernières années. J’y ai découvert, son enfance solitaire, son passé de berserk orgueilleux qui lui valut la mort des hommes sous son commandement à de nombreuses reprises, son exil pour expier ses fautes, sa rencontre avec ma mère, les raisons qui les poussèrent tous deux à me cacher son identité ainsi que celles de leur mort lors du coup d’État du Jarl Bargh le tout dans langage runique parfait. Je pense qu'il voulait que je trouve ce livre après sa mort... Peut-être est-ce là même la raison pour laquelle il m'apprit à lire et écrire. Peut-être savait-il depuis bien longtemps qu'il n'aurait pas le courage de tout me raconter.

Elle ne rebondit pas sur les dernières réflexions du valdra mais une autre chose l'interloquait.

- Et tu es parti à la guerre malgré tout ? Alors que tu connaissais l’implication du Jarl dans la mort de tes parents ? Pourquoi ?

Il hésita. Asgeir ne parlait jamais de la guerre à personne. À personne excepté lors de son retour quand il avait ramené le bracelet de ses frères et sœurs d’armes aux familles dévastées d’Hjarheln, expliquant comment chacun avait à présent rejoint le royaume des défunts. Le simple fait d’évoquer ce conflit lui remplissait l’esprit de mémoires qu’il espérait un jour pouvoir enterrer et ne jamais revoir.
Il se sortit du lit calmement et se dirigea vers ses effets, fouilla son grand sac de toile grise et revint avec un livre en main. Bryyn, surprise tendit les mains vers lui voyant qu’il comptait lui donner et, une fois le livre en main, commença à feuilleter les pages avant de relever vivement la tête, le visage marqué d’un sérieux nouveau et soudain.

- Toi aussi ?

Un sourire éclaira le visage du valdra et il lui répondit avec une sensibilité rare :

- J’en ai décidé ainsi le jour même où je trouvais celui de mon père et il n’a cessé de se remplir dès lors. Tout ce que tu as toujours voulu connaitre de moi est écrit là-dedans. Tu devrais pouvoir le déchiffrer avec ce que tu sais à présent, mais garde à l’esprit que j’y utilise un vocabulaire plus complexe que dans les parchemins sur lesquels tu t’entraines. Je t’expliquerais les mots que tu ne comprends pas.

La surprise la laissa bouche bée pendant quelques secondes puis, elle demanda l’autorisation de lire, le cœur déchiré entre l’excitation et la solennité qu’il est nécessaire d’avoir lorsque l’on plonge ainsi dans la vie de quelqu’un.
Asgeir répondit d’un haussement d’épaules qui se voulait détaché, presque indifférent. En réalité, il sentait le sang battre fort jusque dans ses tempes et se savait trahi par l’irrégularité de sa respiration. Il avait apporté son ouvrage pour que Bryyn pose ses yeux dessus, il en était sûr  jusque-là. Mais à présent que la jeune femme tenait entre ses mains le livre de son existence, il ne savait pas s’il devait se sentir heureux ou terrifié.
L’hésitation toujours fermement ancrée dans son esprit, il lui indiqua pourtant un passage du livre qui faisait suite à la conversation qu’ils venaient d’avoir. La valdra jeta un dernier coup d’œil au visage de son amant et, comprenant le torrent de sentiments qui lui bringuebalait le cœur, entama sa lecture à voix haute.

Il sursauta dès les premiers mots, n’ayant pas pensé devoir écouter ses propres écrits et faillit rétorquer quelque chose, mais il fut stoppé par un petit sourire moqueur et complice. Alors il s’allongea, laissa son dos épouser les peaux de bêtes et les draps. Bryyn, elle, vint poser sa tête sur le ventre nu du valdra et, le livre reposant sur ses cuisses, reprit sa lecture.

« ...Pourtant, en cet instant, tout m’apparaissait avec une clarté telle qu’il aurait pu croire que tout s’était produit la veille. L’odeur du sel dans l’air alors que les drakkars fendaient l’océan était aussi vivifiante que les gifles d’écumes qui rougissaient les joues des guerriers et des guerrières au regard fixé sur ce but qui reposait au-delà de la brume épaisse qui planait sur l’océan Ithérion. Du haut de mes quinze hivers, j’étais autant excité qu’impatient d’en découdre sur le champ de bataille. Seul le regret de ne pas pouvoir vivre cette aventure aux côtés de Père me taraudait le cœur, mais la certitude que ce dernier continuait de veiller sur moi et m’observait depuis le royaume de Morgarht me poussait vers les luttes armées qui m’attendaient. Quitte à oublier peu à peu, les leçons de vie essentielles qu’Osmound avait mis tant de temps à ancrer dans mon cerveau et qui maintenant se noyaient dans les larmes du deuil. Lui disparu, l’intégration était devenu une obsession, un besoin vital qui pouvait se rappeler à moi à n’importe quel moment de mes journées faisant des champs de bataille que j’entrevoyais à l’horizon une occasion unique de m’attirer l’admiration, le respect et enfin la validation de mes paires.
Rares étaient ceux de mon âge dans l’armée – après son coup d’État, le Jarl Bargh avait vu en ma volonté de partir à la guerre si jeune, une opportunité parfaite pour me faire disparaître et n’avait donc apposé aucune résistance à mon départ - et ceux qui s’en approchaient me dévisageaient, méfiants, se demandais qui j’étais moi qu’ils n’avaient pas rencontré aux camps militaires ou au service obligatoire.
L’absence de bracelet – Bargh ne m’avait pas non plus cru bon de me demander de lui prêter allégeance - n’aidait pas au dialogue ou à la compréhension et bien vite au sein du navire, le jeune homme que j’étais, héritait d’un des nombreux surnoms de son père bien que ce dernier était loin d’être celui auquel j’aurais, à l’époque, voulu être rattaché : Asgeir « Le sans bracelet ».
Pour autant, lors de mes tours de rame, je me plaisais à observer que je n’avais pas autant de mal à tenir la cadence que les autres jeunes y compris mes aînés qui venaient de finir leur service. Mon entraînement militaire durait depuis la naissance et mon corps avait été forgé consciencieusement par un maître. Les rares soldats de Hjarheln qui faisaient route avec moi sur ce bâtiment le savaient et prononçaient donc ce surnom avec respect, ne laissant nul rire sortir de leurs gorges lorsque les autres s’en amusaient à l’occasion. Silencieusement, je leur en étais reconnaissant et une complicité silencieuse commença à se tisser jour après jour avec ces soldats de ma région natale. Mais malgré ce soutien, les moqueries des autres ne faisaient qu’accroître mon désir de faire ses preuves et régulièrement fulminant au moment de m’assoupir, je pense qu’il était de plus en plus clair aux yeux de chaque marin que j’attendais avec une impatience croissante le jour de notre arrivée.
Mais à l’aube du dixième jour au large des côtes, je fus réveillé, comme un certain nombre d’autres, par les cris d’alarme du capitaine.

- Tout le monde debout ! Filez à votre poste ! Réveillez-vous au nom d’Alstrom ! Nous sommes attaqués !

Les cornes d’alarme tonnaient et résonnaient dans l’air. L’esprit toujours un peu embrumé, je passais la tête au-dessus du bastingage pour découvrir des navires immenses fonçant sur les nôtres. Noirs comme le bois des arbres de ma montagne d’origine, ils filaient sur l’eau, le bruit des tambours nous parvenant d’ores et déjà malgré la distance.

- Les ordhalerons nous prennent en chasse !

Les cris autour de moi mêlaient horreur et incompréhension et je regardais le visage des valeureux hommes du nord se décomposer devant la menace imminente et son ampleur. Je ne connaissais, pour ma part, les ordhalerons que de nom à cette époque et je ne savais rien d’eux si ce n’est qu’ils étaient connus pour être des monstres sanguinaires et que l’on trouvait parmi eux les plus puissants guerriers du monde. Cette combinaison de facteurs faisait de cette attaque-surprise, le parfait terreau pour que germe la graine de ma renommée.
Debout sur le ponton où tous courraient frénétiquement pour amorcer les manœuvres évasives, ma voix retentit malgré les cris de panique.

- LES GUERRIERS DU NORD NE MEURENT JAMAIS !

Juste une phrase en vieil Alsderne tout droit sortie des légendes d’Urhulfr, « le Roi sans Contrées » devenu après sa mort, l’un des champions d’Alstrom lui-même.
Ma voix, élevée dans les airs, restait en suspend quelques secondes, stoppant tous les matelots dans leurs tâches, forçant leur regard sur moi, haches aux mains, debout sur la poupe. Je touchais un point sensible et je le savais. J’en appelais, devant la mort, à leur nature d’Alsdern, à la fierté de nos ethnies. Je leur rappelais à tous que les Dieux n’oublieraient point demain ceux qui fuiraient aujourd’hui et que jusqu’à la fin de leurs existences, ceux-là devraient vivre avec la honte et les reproches de nos idoles.

Le résultat de cette prise de parole inattendue et puérile ne mérite cependant en aucun cas de se retrouver dans les livres de légendes, car il s’agissait en réalité une suite de mots clinquants dont l’enfant que j’étais ne pouvait comprendre le poids ou le prix qu’en observant les cadavres jonchant le pont quelques heures plus tard, réalisant alors combien de vies peut coûter une phrase. Cependant, il serait injuste de me flageller pour ce massacre, car la mort nous attendait quoique nous fassions : le prix de la fuite aurait été la vie des retardataires.
En lieu et place de ce triste spectacle, les océans auront vu le fier peuple du nord foncer sur un ennemi qui le dépassait pour vaincre ou mourir la hache à la main.

Les premiers drakkars à arriver à la hauteur de nos poursuivants furent simplement renversés, écrasés par la différence de taille entre les bâtiments. Les suivants abordèrent ou furent abordés comme ce fut notre cas. Hurlant à s’en déchirer la gorge pour que la peur ne s’immisce point en notre esprit, nous vîmes une horde de monstruosités sauter sur notre navire et les combats commencèrent.

Certaines de ces créatures étaient gigantesques, plus grandes et plus imposantes encore que les berserks de la cour du Roi, mi-humaine mi-animales, tenant fermement entre leurs doigts crochus des haches de la taille d’un vrëen. Le drakkar s’enfonçait dans l’eau lorsque les plus imposantes d’entre elles sautaient à bord. Mais ces monstres restaient des êtres de sangs et de chair que le fer et l’acier découpaient comme toute autre chose vivante sur Reä.

Après quelques minutes de combat, l’organisation était inexistante et chacun se battait comme il le pouvait, pour sa propre survie, usant de tout ce qui était nécessaire : arme, poings ou dents, car telle était la panique que les ordhalerons provoquaient chez les hommes même les plus endurcis. Je faisais quant à moi face à la créature devant moi, parant ses coups avec succès malgré leur puissance qui laissait mon bras gauche engourdi à chaque fois que sa lame frappait le bois de mon bouclier. L’échange de coups durait depuis plusieurs dizaines de secondes quand ma hache entaillait enfin sa chair et répandait sur le pont un sang noir comme une nuit sans lune alors que mon opposant hurlait de douleur. Cependant mon arme était restée coincée dans son flanc et je ne parvenais pas à l’en retirer. Encore bien lucide, le monstre m’empoigna le bras de sa dextre immense et me projeta violemment contre le bastingage. J’en eus le souffle coupé pendant un couple de secondes qui me parurent être une éternité et je faillis sombrer dans l’inconscience avant que la vue de sa lame se rapprochant de mon visage ne me fasse réaliser à quel point la mort était proche. Par miracle j’esquivais son attaque ralentie par sa blessure, roulais derrière lui et lui sautais sur le dos, dans le but de l’étrangler par-derrière, le corps marchant à l’instinct, le cerveau vidé de toute pensée ou stratégie réfléchie. Surpris, le soldat tenta de se dégager. D’abord en tournant sur lui-même puis, comme je tenais bon, il tenta ensuite de m’attraper de nouveau : sa force lui garantissant la victoire s’il y parvenait, mais son armure complète, bien que résistante, entravait grandement sa liberté de mouvement. Alors que nous comprenions tous deux que mes bras d’adolescent n’avaient pas la force de le priver de respiration, il se mit à me frapper et se jetant contre le mat du drakkar. Je sentis mon dos craquer plusieurs fois, pris entre une imposante masse de fer et une autre de bois, je me sentais comme la lame que l’on forge à grands coups de marteaux. Dans le désespoir grandissant, j’attrapais ma dague à ma ceinture et, hurlant à la mort, criblais son torse de coups alors que ses cris se mêlaient aux miens et que nous tombions tous deux à la renverse sur le pont. Dans un éclair de lucidité, je m’agrippais au manche de ma hache dans ma chute qui s’extirpa enfin du flanc de la créature. Le soldat se rendit compte qu’il ne pouvait plus se lever et resta à genoux, sa respiration bruyante, entrecoupée de borborygmes me fit comprendre qu’il se noyait dans son propre sang. Ses yeux rouges plongèrent dans les miens tandis que j’attrapais ma lame d’une prise confortable et que je lançais un mouvement ample qui amenait inévitablement le tranchant vers son cou.
Le sang noir me gicla au visage et dans les yeux et un goût amer dont je ne comprenais pas la provenance me prit à la gorge, mais j’étais en vie et victorieux. Les hommes encore debout assistaient, les yeux écarquillés à cette scène improbable, ce spectacle peu commun d’un adolescent trop jeune pour se marier riant et clamant sa victoire sur l’une des pires créatures de Reä. Ma bouche ne s’arrêtait plus, clamant la victoire, maudissant mon adversaire au nom des Dieux, galvanisant les survivants qui s’élancèrent avec moi sur les derniers guerriers ordhalerons montés à bord du drakkar. Les blessés s’occupaient quant à eux de trancher les attaches qui nous liaient à l’imposant navire ennemi. Un autre soldat de la Légion rouge tomba sous ma lame, puis un autre, et enfin un autre : le dernier d’entre eux.
Le capitaine voyant le dernier lien tranché ordonna la retraite immédiate et notre navire commença à s’éloigner.

- Qu’est-ce que vous faites ? Hurlais-je. Vous ne voyez pas qu’il en reste !?

La frénésie meurtrière agissait toujours sur mon esprit et il fallut trois hommes pour m’empêcher de me jeter à la mer alors que je cherchais par tous les moyens à rejoindre le bâtiment ennemi afin de finir ce que j’avais commencé.

Alstein était un des guerriers partis d’Hjarheln avec moi et un des plus expérimentés de manière générale. Il faisait partie des trois hommes qui m’avaient arrêté et dès que nous fûmes assez loin, sa main large et dure comme une planche de bois s’écrasa sur la face droite de mon visage.

- Reprends-toi gamin !

Le choc me stoppa et je m’immobilisais. Voyant cela, il se décida à me lâcher et s’éloigna momentanément. Il réapparut devant moi un sceau à la main, s’arrêta un instant et plongea ses mires dans les miennes comme il plongea, l’instant d’après, le récipient dans l’océan dans un geste vif emplit de colère et de frustration. Il l’installa devant moi et, de ses grandes mains, attrapa mon crâne et lui fit faire une bonne dizaine d’allers à l’intérieur avant de me saisir par les cheveux et de m’amener au niveau de la poupe. Là, il me plaqua contre le bois de la coque et me fit regarder derrière nous.

L’eau salée me piquait terriblement la gorge les yeux que je frottais avec empressement de ma manche ensanglanté, laissant au passage une large trace d’un rouge sombre sur toute la partie supérieure de mon visage, mais me permit d’ouvrir mes paupières sans ressentir la morsure aiguë du sel.
« Dévastation » fut le seul mot qui me vint à l’esprit. Autour des bâtiments de la marine de la légion rouge, les restes d’une vingtaine de drakkars coulaient ou brûlaient contre seulement quatre ou cinq navires ordhalerons. Les survivants fuyaient maintenant vers le large, abandonnant les hommes tombés à l’eau à la noyade, espérant pouvoir se cacher dans la tempête qui semblait se déclarer au loin : cadeau d’un Wern ou Grid pleurant sur notre sort. Les corps de nos frères et sœurs d’arme flottaient çà et là tandis que d’autres, équipés plus lourdement, avaient déjà rejoint Alta dans les eaux et probablement aussi Morgarht, dans la mort.
Je sentis mon cœur comme saisi, compressé par une main invisible jusqu’à atteindre ses limites et une envie de vomir difficilement répressible me remonta à la gorge. Mes yeux quittaient la mer pour observer le pont de notre fière embarcation, mais le même spectacle s’était joué sur cette autre scène. Bloqué entre horreur et incompréhension, je me levais et parcourais lentement, en traînant des pieds, le pont dans sa longueur. Les valides étaient adossés au bastingage, muets, exténués et effrayés, les blessés à l’agonie, implorants et gémissants, les morts, yeux ouverts vers le ciel, une lame coincée dans la chair, le sang se répandant sur le pont accompagné parfois de quelques morceaux d’entrailles et de boyaux.
Çà et là un peu de sang noir des ennemis abattus qui semblait ne jamais devoir disparaître du pont même après mille lavages assidus et l’action du sel.
Soudain, une tension inhabituelle dans la main droite me fit baisser le regard et je découvrais ma hache, enserrée par des doigts qui refusaient de se relaxer, restant sourds à mes appels. Effrayé par cette perte de contrôle, j’utilisais mon autre main pour libérer mon arme de leur emprise et celle-ci tomba lourdement sur la sylve.
Comprenant lentement l’horreur à laquelle je venais d’assister, de participer, réalisant combien de ceux qui étaient montés à bord avec nous nourrissaient à présent les créatures de la mer, je me trouvais un coin de pont où me recroqueviller, où disparaître, les yeux perdus dans le vide, mon corps endolori profitant du repos que nous octroyait le vent tiède propre aux pays du sud de l’Ordanie qui nous faisait avancer sans que nous n’ayons besoin de ramer . Et je m’asseyais, un bout de tissus sur la tête pour masquer mon visage emplit de larmes attendant le moment où nous pourrions enfin faire halte sur la terre ferme. »


Les flammes affaiblies de bougies et leurs sœurs rugissantes de l’âtre faisaient danser les ombres sur les murs de la chambre. Les herbes séchées suspendues par Bryyn durant cette pause répandaient une odeur enivrante à travers le foyer. Une odeur de miel, douce et sucrée avec une pointe poivrée qui pouvait donner au nez sensible, l’envie d’éternuer.
La jeune femme nue, une chandelle à la main fit le tour de la chambre et éteignit une à une les bougies disposées un peu partout jusqu’à ce qu’enfin, les amants n’aient plus pour seule source de lumière que les flammes du foyer.

- Peu de gens parlent de la guerre dans la région, dit-elle après s’être enroulée dans les draps blancs et les peaux et de nouveau blottie au plus près d’Asgeir.
Ce dernier eut un petit rire fataliste.

- Ils font comme si elle n’existait pas… Peut-on vraiment les blâmer ? Nous avons tous foncé tête baissée dans une guerre qui ne nous concernait pas sous les directives d’un Roi hésitant, lui-même embobiné par les divagations d’un fou sanguinaire dévoré par l’envie et le besoin de pouvoir.

Bryyn le regarda silencieusement, mais nota la colère dans ses paroles. Elle sentait que le guerrier tenait les deux souverains pour responsables des multiples bains de sang auquel il dut assister pendant ses quatre années au front.

- Il n’y avait rien quand nous sommes rentrés… lâcha-t-il en se mordant les lèvres avant de reprendre après un court silence. RIEN pouvant permettre de justifier le sacrifice de tant de vies. Pour les gens restés au pays, c’était comme si leurs fils, leurs filles, frères,sœurs et parents avaient sauté dans le vide. Il n’y avait aucun motif de réjouissance alors…

Il se stoppa et la regarda dans les yeux.

- Autant faire comme si rien ne s’était passé. Comme si les hommes et les femmes partis n’avaient jamais existé… Alors on tait leur nom, on évite de poser des questions sur la provenance des objets de famille sur les armoiries, sur les parents des autres et, si jamais quelqu’un fait l’erreur de poser une question, on répond qu’on ne sait pas, que oui, untel est mort, mais tout en taisant la cause… Cette situation durera encore pendant plusieurs années, le temps que les cœurs blessés guérissent, que les enfants grandissent, que la honte d’avoir envoyé tous nos jeunes au massacre ne passe.
Bryyn acquiesça avant d’ajouter.

- Et puis il y a ceux qui sont revenus… changés.

Asgeir la regarda avec gravité, mais ne trouva rien à répondre. Pendant un moment, on entendit que le bruit des flammes dans la chambre, berçant les deux Valdras.

- Qu’as-tu fait ? Lorsque tu es revenu, je veux dire…

La question le fit sourire, encore une fois. Chose rare que Bryyn notifia, se demandant si elle avait même déjà vu le valdra abandonner autant de fois son masque de pierre en une soirée.

- Eh bien, j’ai repris mon apprentissage auprès d’Ürthen, à la forge. Tu étais probablement trop jeune pour te souvenir de lui…

- Je me souviens d’Ürthen ! Coupa-t-elle, enjouée de redécouvrir, à la mention du vieil homme, nombre de souvenirs enfouis depuis longtemps. Il effrayait les nouveau-nés malgré lui, mais les enfants du village l’adoraient. Il avait toujours du sirop doux comme le miel des dieux qu’il vendait pour une bouchée de pain aux familles les plus pauvres tout en restant intransigeant avec les fortunées.
Asgeir hocha de la tête avec un sourire nostalgique en se remémorant les hordes de gamins braillards qui harcelait le vieux forgeron de lever au coucher du soleil pour une histoire légendaire, une gorgée de sirop ou juste pour l’entendre refuser les deux précédentes propositions et demander qu’on le laisse tranquille, sa voix rauque, mais débordant d’affection trahissant un visage sévère et un air sombre qui, comme un masque, restaient collés à son visage la plus grande partie de la journée.

- Son fils était avec moi pendant les raids. J’ai été témoin de ses derniers instants, de son corps transpercé par une lance kaerd à quelques jours seulement du repli. Le pauvre bougre n’est même pas mort sur le coup. J’ai entendu ses cris dans mes rêves pendant plusieurs années. Peut-être sont-ils la raison pour laquelle je n’ai jamais trouvé le courage d’avouer à son père qu’il était mort si proche de la fin de la guerre… Si je ne peux l’affirmer avec certitude, je continue à penser que cela n’aurait fait qu’accroître la difficulté de son deuil.

La jeune femme décida de ne rien dire, mais ne put s’empêcher de penser qu’il était étrange d’entendre Asgeir raconter qu’il avait manqué de courage pour quoi que ce soit, lui qui était connu de tous comme un homme que la peur elle-même évitait.

- Personne ne te connaît mon amour, chuchota-t-elle dans un soupir triste et mélancolique.

La voix du guerrier avait faibli lors de ses dernières phrases aussi, Bryyn ne s’étonna point de n’avoir aucune réponse. Elle se souleva un instant pour observer le visage d’un Jarl plongé dans un sommeil profond et visiblement agréable, sourit, jeta un regard aux dernières braises qui brûlaient dans l’âtre et se recoucha à ses côtés pour le rejoindre dans le monde des rêves.


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Ses paupières s’entrouvrent, s’éveillent au monde une fois de plus sous la caresse insistante du même rayon de soleil qui le tire de son repos jour après jour en cette saison. Ses sourcils se froncent et ses yeux se plissent en réaction à la forte luminosité (l’invalide réagissant comme son homologue malgré l’absence de stimuli). Sa dextre attrape la courtepointe qui le recouvre et la repousse - de même que les chaudes peaux - délicatement vers les extrémités de ses longues jambes puis, dans un mouvement aussi agile que possible en ce début de matinée, il entreprend de s’extirper de son lit. Cependant, alors que le plat de ses pieds épouse le sol, préparant sa levée, une douce chaleur enveloppe son poignet, l’empêchant ainsi de fuir sa couche.
Tant par habitude de posséder une vision réduite que par le fait de connaître le même scénario lors de la plupart de ses réveils, Asgeir ne cherche pas à voir ce qui le retient.

- Tu pars encore sans rien dire ? Je commençais à croire que les choses changeaient...

La voix, féminine, résonne accusatrice, tremblante à cause de la fatigue, prête à s’emporter si les justifications de son interlocuteur ne lui conviennent point. Sentant le regard de la jeune femme peser avec insistance sur son dos droit, fort, bien que passablement courbé par le poids de quarante lourdes années d’existence, Asgeir sourit en imaginant ses sourcils froncés faisant ressortir le bleu glace de ses iris, sa lèvre inférieure légèrement pincée par ses canines de droite, son petit poing serrant fermement un bout de drap, l’esprit apeuré par ce qu’il pourrait répondre.

L’homme se délivre de l’étreinte, fini de se lever, avant que sa forme nue ne commence à arpenter la pièce, son œil valide balayant la chambre à la recherche de ses affaires. Soudain, il les trouve et se dirige vers elles, mais ne s’empare que de ses dessous et d’une chemise de coton. Alors que le tissu masque finalement son grand corps fin pourtant renforcé d’une musculature plus que solide affermie par l’entraînement et la vie quotidienne brutale que doivent mener tous les habitants de cette région perdue, Asgeir laisse échapper dans un grommellement :

- Je vais réveiller Skyari et mettre de l’eau à chauffer. Tu peux te lever tranquillement.

Son œil valide se pose enfin sur l’alitée, chaleureux, accompagné d’un sourire tout aussi rassurant partiellement dissimulé par une épaisse barbe grise. Blottie dans les couvertures, Bryyn tente de cacher sa joie en replongeant son visage dans son oreiller le temps d’un bâillement feint tandis que le son des pas se déplace vers la pièce adjacente.

Le sol de la salle à manger apparait comme un habile agencement de briques de terre cuite rouge pâle parsemé d’incrustations de débris de céramiques de petite taille qui, une fois polis et disposés avec soin, dessinent nombre de motifs agréables aux yeux sur l’ensemble de son étendue. Quand les pieds nus du Valdra le foulent, un frisson le parcoure, produit du différentiel de température forçant son regard vers la porte d’entrée situé sur le mur de gauche. Asgeir fronce les sourcils un court instant, laissant échapper un léger « Tss » de mécontentement en se rappelant la nécessité de réparations sur cette dernière qui, désormais bien faible après le déchaînement des vents sur le village lors des semaines précédentes, laissait maintenant pénétrer à l’intérieur une grande variété de courants d’air tous plus déplaisants les uns que les autres, rendant compliqué l’allumage du feu et forçant les occupants de la maisonnée à se couvrir d’épaisses peaux tannées dès la nuit tombée.

Les oreilles du quarantenaire captent soudain quelques craquements, dirigeant l’attention de leur propriétaire vers la cheminée. Le valdra n’a besoin que d’un œil pour comprendre qu’il lui faut se hâter s’il veut éviter d'avoir à rallumer entièrement le feu et c’est d’un pas pressé qu’il s’élance vers l’âtre où quelques dernières braises au rouge fanant se battent encore pour leur survie dans ce désert calciné où il ne leur reste que de rares cendres accompagnées de quelques restes de bûches noires et trop éloignées du centre pour être dévorées.
Après quelques efforts, les flammes commencent à danser de nouveau alors qu’Asgeir dépose une lourde bouilloire en fer sur son support avant de se détourner de l’âtre pour monter la grande échelle qui conduit à l’étage : au garde-manger. Au fond à droite, derrière les étagères pleines de fruits des récoltes de l’été et gibier des récentes chasses, séparé de ces dernières par un petit rideau, un petit lit en bois sculpté de runes prenant la forme d’une embarcation à la figure de proue draconique sous laquelle repose un petit corps assoupi entouré de bouquets de fleurs à la senteur divine. Asgeir s’approche doucement de la fillette qui lui tourne le dos et appose dans un geste empli de douceur, l’une de ses immenses mains – bien trop longue et large pour un homme de sa stature – sur le crâne de la charmante créature qui repose dans cette véritable œuvre d’art confectionnée par l’ébéniste du village.
Il sent Skyari sursauter à son contact et rapidement se mettre à trembler et retire alors sa main pour prononcer lentement :

- C’est moi, petite perle. Tu n’as rien à craindre.

Les tremblements s’estompent rapidement et l’enfant se lève à toute vitesse pour se jeter dans les bras du quarantenaire qui lui rend son étreinte et ses caresses avant de la soulever dans les airs et de la reposer sur son épaule à la manière d’un sac de farine laissant au passage la fillette éclater d’un rire qui, déjà, chasse la peur et l’angoisse qui secouait son petit corps quelques secondes plus tôt.
Sortant de la chambre, encore somnolente et vêtue d’une chemise, pareille à celle du valdra, Bryyn ne peut s’empêcher de sourire de ce brouhaha : mélodie à ses oreilles lui rappelant la fin d’une période de douleur. Une période qui lui semble de plus en plus lointaine lorsqu’elle regarde sa fille sur les épaules de l’homme qu’elle aime, jouant avec ses longs cheveux au gris prématuré.

"3e Verne du mois de Garge, an 86 de l'ère des Rois."
Calim Al'Azran
◈ Missives : 2342

◈ Âge du Personnage : 82 ans
◈ Alignement : Loyal Bon
◈ Race : Valduris
◈ Ethnie : Sharda du Nord
◈ Origine : Al'Akhab - Siltamyr
◈ Magie : Aucune
◈ Fiche personnage : Calim
◈ Crédit Avatar : Old man with a cane By Igor Babailov

Conteur
Calim Al'Azran

◈ Mar 7 Sep 2021 - 12:44

Et c'est validé \o/
Gg

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