Réceptacle
Sláine Ascall
◈ Ven 31 Oct 2014 - 11:22
Magie La magie compose le corps de Sláine et l’essence de celle-ci appartient à son esprit ; la jeune femme peut faire pénétrer dans l’intellect des gens des illusions horrifiques, les dirigeants vers la folie destructive. Ses pouvoirs encore instables menacent de la perdre dans les nuances de son intellect, déjà lors de la découverte de son don, elle y perdit une parcelle d’elle-même. Durant sa fuite, Sláine se fit happée dans un monde inconnu où elle eut la désagréable surprise de distinguer un monstre intangible. De cette rencontre qui lui glaça les sangs la jeune femme se lia avec le Drake en rédemption Draphixas, il lui fit dont de sa capacité à user de la magie métabolique, lui permettant d’user d’une force au-dessus du commun. Compétences, forces & faiblesses Compétences> Arts de l’ombre (Métier engagé : Sicaire) - Cryptographie (décryptage et conception : avancé) = Elle en a longuement appris les bases afin de mieux encoder ses propres messages et de ne jamais se faire attraper, tout autant que de déchiffrer ceux qui lui étaient, ou non, destinés. - Anatomie (zones vitales, mise à mort, mutilation : avancé) = Elle connaît tous les points faibles de l'homme, dans une grande exactitude. - Résistance à la douleur (maître) = La vie de cette femme fut l'une des pires vécues. Sûrement fait-elle partie des maudits d'Alvar, ceux devant vivre plus de mille vies de tourments. Les coups, le viol, les blessures profondes, rien ne lui a été épargné, mais une chose est sûre : elle a appris à les encaisser et délier sa langue ne sera pas mince affaire. Elle préfère mourir, à l'agonie. - Torture (avancé) = Peu peuvent ressortir vivants. Elle saura où appuyer, sur les points les plus sensibles, afin de faire plier. - Discrétion (déplacement silencieux, furtivité, déguisement : maître) = La sicaire se fond dans le silence, dans l'illusion des gens invisibles. Ses talents en la matière sont une nécessité pour sa survie. - Crochetage (intermédiaire) = Briser les coffres contenant les données rechercher, ou simplement les verrous entre elle et sa cible. - Traque(surveillance, enquête, pistage d'un être évolué : maître) - Collecte d’informations (infiltration, utilisation d’un réseau, contacts, etc : expert) = La traque et la recherche, sa patience liée, le réseau de l'Aigle, ont convenu de lui fournir les expertises à l'espionnage malgré son jeune âge. > Compétences générales - Natation (novice) - Lecture & écriture (avancé) = Elle a appris tardivement cet art. - Survie en milieu sauvage (avancé) - Survie en milieu urbain (expert) = Les âmes errantes d'un ordre secret doivent savoir survivre avant de tuer. Elle aura appris à chasser, ou même quand la situation l'exige à voler sa pitance, savoir où dormir qu'il s'agisse d'un pont ou de la sécurité d'un arbre. - Maniement d'armes communes (épée : avancé, arbalète : expert, dagues : maître) = Formée aux arcanes du combat par son ordre, elle ne pourra toutefois surpasser un véritable militaire avec des épées. Connaissant pourtant chaque point vital, chaque faille, elle aura facilité avec une lame courte à glisser entre les protections, pour rompre un tendon ou toucher un point vital. Le tir, quant à lui, est impératif à celui qui doit, souvent, froidement tuer et de loin quand la situation l'exige. La femme est une arme, conçue pour tuer, désarmer, défaire, parer. Sa réussite repose sur sa survie. - Équitation (avancé) = Sans monter comme un Chevalier, ses errances l'ont forcée à comprendre les rouages de l'équitation et du soin à ses montures. - Bagarre de rue (Intermédiaire sans le concours de sa magie, Maître avec la force du Dragon) = Elle sait se battre pieds et points sans toutefois posséder les techniques militaires. Sa force nouvelle, spasmodique mais terrible, peut être dévastatrice. - Esquive (expert) = De l'art des ombres de survivre et d'échapper aux coups. Forces et FaiblessesSon esprit comme son corps étaient ses plus grandes forces, mais ils recelaient également ses plus grandes faiblesses. Sláine s’équilibrait naturellement en se contenant, elle supportait les tortures physiques et psychiques les plus douloureuses, mais toutefois elle recelait un feu ardent et bilieux qui pouvait lui enlever toute réflexion. Physique - Iris : L’œil droit est un bistre clair tournant à l’or et le gauche d’un bleu profond aux reflets d’argent. - Chevelure : Brune - Peau : pâle - Taille : 1m68/ 5 pieds 2 pouces À regarder Sláine, on se disait qu’elle n’était pas de ces beautés sophistiquées et raffinées qui devaient à leur héritage génétique un éclat que les âges et les générations avaient peaufiné jusqu’à l’exacerbation la plus délicieuse. Non, Sláine était une fleur née dans les plus sombres marasmes de la vie et de l’existence, puisant dans on ne savait quel ressource de l’être pour avoir un assemblage qui se disait harmonieux, mais qui comme toute création née dans la fange, elle n’était pas destinée à être éternelle. Cette créature, dont l’éphémère grâce pour n’avoir que plus de splendeur dans leur heure de gloire, était consacrée à retomber parmi ses pairs plus bas que terre. Là où pléthore de femme arboraient une anatomie fine et molle, sauf celles qui travaillaient dans les champs, Sláine n’était pas malingre. La jeune femme revêtait un corps long, souple et nerveux tout en muscles fins avec des hanches et des reins fermes et pleins, où une taille menue en accentuait les courbes. Une poitrine jeune et ample était soutenue par des épaules aguerries. Non, elle n’était pas faible, elle était solide comme les bas fond de Kaerdum. La sicaire était aussi inébranlable que la plus abjecte image de l’espèce humaine. Son corps robuste, taillé par la vie et les entrainements, se situe dans le juste milieu de son espèce : ni trop grande, ni trop petite. Sláine pouvait se fondre dans la masse sans interloquer le regard lorsqu’on ne faisait pas trop attention à elle. Si on s’y intéressait davantage, on voyait des yeux vairons qui étaient le signe de son infamie, l’un était d’une couleur noisette très claire s’apparentant à l’or et l’autre d’un bleu vif aux allures tranchantes et métallisées. Ces deux pièces étaient celles qui avaient tout fait basculer. Souvent, elle avait désiré crever l’un d'eux, mais elle préférait en masquer un, en alternant, à l’aide d’un chiffon qui recouvrait la moitié de sa tête. Ce visage était presque rendu transparent par la puissance des regards qu’elle décochait, minois en forme de cœur aux traits juvéniles et bien dessinés, mais marqués par la dureté d’antan. Le teint était pâle, les joues souvent incolores, les lèvres dessinées n’étaient pas opulentes, mais le sourire narquois qui s’y nichait souvent mettait une nouvelle flamme à sa personne. Sa chevelure était l’une de ses plus vielles complices, souvent rempart de ses malheurs. Elle était très longue, lui arrivant mi-cuisse, même si en fonction des époques de sa vie, elle avait dû parfois sacrifier beaucoup de ses mèches afin qu’elles récupérèrent de leur superbe. D’un brun profond ses cheveux étaient lisses et ils servaient de paravent à ses prunelles où encore au reste de son corps, sa peau claire était marquée des stigmates de son histoire.. De ci et de là, on voyait disséminées sur sa personne des cicatrices diverses, certaines plus importantes que d’autres. Mais dans tous les cas, elle n’était pas indemne. Caractère Ce qu’on voyait de son corps portant l’anathème n’était pas duperie : Alvar forgeait les êtres à son image et bien que certains l’estimaient doux et miséricordieux, il n’en était rien. Il taillait dans l’intellect comme dans la chair, le démiurge modelait la personnalité de ceux qui traversaient leur destinée, leur rappelant âcrement qu’ils existaient et que l’instant présent n’était pas qu’un simple mauvais rêve afin de les acculer jusqu’à leurs dernières limites, comme un chat jouerait avec la souris de son futur repas. C’était ce que Sláine rendait à ses victimes : un écho prégnant de son passé. Elle était sicaire avant d’être elle-même. Sláine n’avait pas été sereine depuis trop longtemps, ses souvenirs pouvaient remonter vers l’aurore de son existence : ils étaient perdus dans les nuages mirifiques d’un sombre marasme qui l’avait ensevelie pour l’engloutir dans une forme de douce folie. En vérité, ce fut ce vertige qui lui permit de vivre dans ce monde terrifiant et pitoyable qu’était les bas-fonds de Kaerdum, voir simplement de la réalité de sa vie. Engourdissement de la sensibilité, sorte de sommeil animal où les gestes et actions obéissaient à des besoins primaires : elle voulait manger elle le prenait, elle souhaitait avoir chaud elle mordait jusqu’au sang qu'un souffle vital lui réchauffe les entrailles. C’était de cette rage d’être qu’elle avait apprit à contrôler au sein de l’ordre secret de Kaerdum. Elle recelait un cœur plein de violence contenue avec un fond irascible. Elle souffrait de ce trop plein de réalité, il lui manquait des certitudes et surtout elle était incomplète dans sa perception de l’affection, des repères fondamentaux que la Kaerd n’avait pas reçu dans son évolution. En somme, elle n’avait fait que grappiller dans certaines formes d’attachement grégaire et bestial ce besoin et elle offrait aux autres cette carence en compensant par un don de soi total, qu’importe ce que cela lui coutera. L’animal qu’était la Vreën était un contraste étrange mais essentiel chez elle, qui oscillait entre sa profondeur et son individualisme. Les fauves n’étaient pas fondamentalement altruistes, cependant Sláine dans son existence s’était vue se révolter contre la médisance des plus forts. La gueuse allait à l’encontre de la haine et du pouvoir que se donnaient les éminents sur les plus faibles qu’eux et ce qu’importe la caste ou la couche sociale où ils se trouvaient. Elle était une louve solitaire qui avait besoin d’un clan, d’un groupe auquel se rattacher. Mais au-delà de cet endormissement de sa personne, elle survécut avec sa meilleure arme : l’humour, ironie acérée qui taillait toutes choses, même elle-même. La jeune femme se moquait de tout qu’importe la situation. C’était cette forme d’autodérision en la vie et envers son entité propre qui l’empêcha de noircir le tableau davantage qu’il ne l’était et de placer ses pions à la bonne place. Son insolence envers tout lui donnait accès à un œil ouvert sur la réalité. Très peu croyante, voire totalement athée, sa foi était bien la seule chose avec laquelle elle ne transigeait pas. Depuis sa prime enfance et dès qu’elle eut entendu parler d’Alvar, elle le calomnia, l’accusant de son existence et surtout lui reprochant les croyances ridicules qu’il imposait à l’intellect des pauvres hères sous sa coupe. Les autres systèmes de déité étaient tout aussi ridicules que la croyance des Vreën. Inventaire Sláine est tout le temps vêtue d’un lamellaire de cuir, c’est la tenue traditionnelle de l’assassin ou de tout autre voyageur tenant à être protégé, ainsi qu’à être libre de ses mouvements. Par-dessus cela, elle entoure son corps d’une longue et ample cape en laine noire qui possède un large capuchon. Sinon, elle a apprit à apprécier les pantalons en cuir, ainsi que les chemises de lin, les robes avec surcot ne sont pas dans sa préférence et la seule époque où elle portait des jupes, elle montrait plus qu’elle ne se couvrait. Ainsi, elle préfère la simplicité du lamellaire avec la sécurité qui s’en accompagne. Ses armes et autres objets, elle les possède de par son ancien statut dans l’Aigle d’Argent et ne s’est pas privée pour les garder dans sa fuite : une épée courte, deux dagues jumelles, une arbalète de poing avec ses carreaux, un arc court avec son carquois, ainsi qu’une besace contenant les ustensiles qu’il faut afin de crocheter une serrure et une corde pour lui permettre d’escalader des façades trop hautes. Et en dernier lieu, elle possède un Frison, cheval puissant lui permettant de parcourir de longues distances. Il est le fruit d'une rapine durant sa course pour échapper à l’ordre et aux soldats qui la poursuivent. Histoire « Il y en a qui attirent la poisse comme la charogne pour les gypaètes sur dix lieues à la ronde. L’esquisse d’un sourire en coin vint ourler ses lèvres. Et vu comme vous n’avez pas arrêté de fixer mes yeux, il est évident que vous avez compris en partie à qui je faisais référence. » Il y avait ceux qui naissaient avec une myriade de privilèges, ceux qui guerroyaient pour en obtenir ne serais-ce qu’une once et encore ceux qui, malgré leurs efforts, retombaient d’où ils étaient venus par l’intervention d’une tierce personne, ou encore du destin qui se chargeaient pour eux de leur rappeler qui ils incarnaient et qui ils étaient destinés à n’être que ce que leur naissance leur dictait d’être : c’est-à-dire de la bagatelle. L’étoile de l’assassin aurait pu être toute autre si on n’avait pas décelé dans son apparence de poupon un défaut, là où l’âge tendre de l’enfance incarnait que perfection ; elle était maudite pour de simples nuances dépareillées dans son regard, de cette imperfection Sláine fût condamnée aux abysses. Les réminiscences de cette époque étaient trop succinctes pour qu’elle possédât un relent de nostalgie ; elle fut abandonnée à l’approche de l’aboutissement de sa deuxième année, mais la gueuse ne sut jamais exactement quel âge elle avait et le milieu où elle échoua ne fut pas de ceux qui s’en souciaient : on vivait au jour le jour, sans penser à l’avenir et encore moins au passé. Sa famille quelle qu’elle fut n’était pas cruelle dans son fond, mais lâche ; ils l’avaient abandonnée dans la discrétion de la nuit devant le parvis d’un temple blanc construit à la gloire d’Alvar. Les Assesseurs, quand elles aperçurent le signe que la petite portait, ne surent qu’en faire et lorsqu’une volée d’enfant fut emportée par des bélîtres, Sláine avec eux, elles ne s’attristèrent pas pour cette enfant maudite, priant pour qu’elle retourne au plus vite dans les bras du royaume noir d’où son essence était issue. Ce vol d’enfant conditionna le reste de son existence, les aléas de la vie étaient ainsi et, de part le fait que la majorité des Vreën étaient miséricordieux et surtout pieux, elle apprit à haïr l’essence même du Dieu qui l’avait rejetée. La misère n'était supportable que lorsqu’elle n’était pas totale et, malgré la découverte rude qu’elle fit dans ses plus jeunes années, elle fut entourée. Le cloaque immonde qui l’avait capturée afin d’avoir une nouvelle main d’œuvre n’était pas exempt d’une certaine forme de code ainsi, ceux qui entraient dans son sein étaient protégés tout le long de leur misérable existence. Sláine avait droit à un toit où s’abriter et si elle avait mérité sa pitance, elle pouvait se battre pour quelques rognures avec les chiens et les autres enfants. Chacun devait gagner sa place et les gamins étaient rabattus au rang le plus bas, ils n’étaient bons qu’à la mendicité. La petite eut la seule fortune d’être assez solide pour ne pas se faire briser les os dans le dessein d’attirer davantage les doléances et surtout l’aumône des bonnes dames. Sur sa peau et sur celles des autres petits emmenés mendier dans les rues, on collait des pastilles de pain trempées dans du miel afin d’attirer les mouches, pustules qui disparaissaient tous les soirs et symboles de la magie de ces lieux immondes. Sláine en plus de cela avait le traitement régulier de recevoir un coup au niveau de son œil droit pour masquer, par le gonflement des chairs, le signe de sa malédiction. Sláine s’amusait dans cette déchéance, ou plutôt se moquait d’elle-même, de ce qu’elle était et des pauvres bigots. Elle se distrayait à narguer le petit peuple ou même des grands seigneurs avec sa face de misérable maigrelette qui ne mangeait pas à sa faim et dont chaque centimètre de peau était couvert de boue et autres reliquats écœurant qui traînaient sur les sols de la ville. Ceux-là la couvrait davantage que la pauvre chemise qu’elle portait pour seul vêtement. Longue chevelure brune presque noire en bataille et tellement poisseuse de saleté que chacune des mèches se reliaient ensemble pour pendre dans un amas jusqu’aux bas de ses cuisses. Devant elle s’érigeait un pauvre groupe de pieuses dames qui la regardaient, atterrées. Elle était dressée du haut ses dix ans, jambes écartées et pieds nus plantés fermement dans la fange, mais surtout son visage creusé par l’indigence était perlé d’un sourire cynique qui répondait à l’éclat de ses prunelles, celles-ci que fixaient avec horreur les cagotes. « Alors les bigotes vous z’avez s’que ça à faire que de vous l’planter devant mes guiboles ? Gouailla-t-elle avec un sourire sombre, obscur comme son existence et tranchant comme la mort qui la côtoyait quotidiennement. — Un esprit malin venu du royaume noir ! Va ! Retourne d’où est-ce que tu viens ! — Elle possède la marque des maudits ! S’insurgea une deuxième, chacune des bourgeoises en rajoutaient une couche jusqu’à créer autour d’elles et de Sláine une masse qui faisait un cercle, menaçant l’enfant de sa houle vengeresse. — Qu’elle meure ! Démone, retourne dans les entrailles nauséabondes d’où tu viens ! » De cette réplique s’ajouta une pierre qui vola violemment sur elle, la touchant à l’épaule. Sláine serra les dents durement ; ce n’était pas la première fois que la sentence des cailloux s’abattait sur elle, mais en général elle avait un moyen de s’enfuir de cet endroit. Pourtant, en réplique elle rit d’un rire dément. La vie était d’une ironie sans borne et elle lui rendait cet hommage d’une révérence bien basse. Cette hilarité incongrue fut le signal qui fit éclater la fureur de la foule emprunte d’une folie meurtrière. Il en fallait peu à la populace pour atteindre ce stade et il était courant de voir ces - soi-disant - miséricordieux exécuter un pauvre hère sans défense. La pluie de rocaille, qui tombait comme les foudres d’Alvar sur elle, s’éternisait, la mettant au sol, en sang. Le souffle haletant, l’enfant des bas fonds appelait la mort dans cette agonie honnie, avec par-delà elle et n’importe où elle portait ses prunelles, elle ne voyait qu’une brume sanglante ou les cris. La hargne appelait au crime. Ils ne la laisseraient que pour morte, plus éteinte que vive dans la boue et les miasmes. Alors qu’on retourna son corps perclus sur le dos, Sláine ne réagit pas, ses prunelles vides voilées de la brume de l’inconsciente. Plus tard encore, ce fut pareil quand la foule fut dispersée après qu’ils eurent perpétré leur office : les siens vinrent la chercher et l’emporter. C’était à se demander qui étaient les plus immondes créatures entre ceux avec qui elle vivait ou ceux qui n’hésitaient pas à attaquer à mort une enfant juste par peur de l’inconnu ; la misère avait cet esprit de solidarité qui n’existait plus, pas ou peu dans les milieux plus aisés qu’eux. Ces créatures qui n’existaient pas pour le monde, juste les rebut de la vie, ils ne possédaient plus que cet instinct grégaire qui les portait ensemble pour ne pas se faire détruire. Ce fut dans une ambiance chaude presque étouffante qu’elle se réveilla. Mais avant que ses sens n’eurent reprit totalement leur droit dans l’inconscience elle perçut des sensations nouvelles pour son cœur : la chaleur d’une étreinte, un giron moelleux sur lequel son visage reposait, mais surtout une odeur qui n’était pas celle de la pisse ou encore des excréments qui formaient son quotidien. Un chiffon humide et chaud tamponnait ses plaies, ce qui la fit geindre. « Hé ! La frangine elle s’réveille. Ma mignonne… Sláine maintint obstinément ses paupières closes, l’usage de cette langue verte toute particulière au milieu des gens avec lesquels elle avait grandi lui fit perdre le peu de bien être qu’elle pouvait ressentir. Toutefois, au vu des claques qu’on lui donnât, elle dut bien ouvrir ses prunelles au monde et découvrir le cercle de trogne qui se dressait devant elle. Ça par Alvar lui-même, Sláine pouvait confirmer qu’elle n’était pas morte : la ribaude au-dessus d’elle avait le visage bouffi par la vie et les roustes que son maître lui donnait en correction et les autres n’étaient guère mieux. La déchéance de ces mufles de drilles et de narquois, rougis par l’alcool et les meurtres, étaient suffisamment éloquents. Putain tu t’es pris une péta violente Argua la femme sur laquelle l’arrière de sa tête reposait. S’quelle idée d’aller chercher les femmes t’ces margoulins. Ta d’la chance, la camarade ne t’a pas crochée. Dans un geste ‘délicat’ elle cracha au sol tout son dégout pour les nobliaux et bourgeois. La harangue grasse et inquiétante qui émouvait tous les honnête gens de Raiendal n’était là que pour confirmer la vision qu’elle avait eut, les serres de la cour des argotier l’avaient reprise. Allez l’gars, vous voyez bien que la mionne va s’rétablir et Beau garçon a dit qu’il allait s’occuper d’son cas. Hein ma mignonne ? T’vas venir avec nous maintenant. T’es trop belle pour rester à mendier avec c’connards. Sláine referma les yeux en s’enfonçant davantage sur le coussin de chair qui lui servait de support. Elle s’y attendait… Cela allait arriver et elle esquissa à peine un sourire ironique, la voilà Putain ! Combien de temps lui restait-il avant de finir morte dans le caniveau, les jupons encore retroussés par un mauvais payeur ? Ou bien de la chaude-pisse ? Elle ne se donnait pas cinq ans avant de finir détruite comme cette pauvre fille à canon, dix maximum pour mourir en faisant passer le bâtard d’un client. Sláine finit par rire, gloussement gras, écœurant, malgré le fait que tout son corps la fît souffrir. La seule perspective qui l’enchantait c’était d’imaginer les seigneurs qu’elle parviendrait à effrayer par cette fleur étrange et démoniaque qu’elle était, qui s’y piquerait de curiosité pour goûter au fruit déchu d’Alvar. Hahaha, tu ris ma mignonne ? Les clients aiment qu’on l’met en train ainsi. L’faut les faire boire, parfois certains s’endorment et on peut leur piquer leur bourses et les faires éjecter de la maison. Tout pour nous et des nèfles pour eux ! » Dit la pute dans un ton câlin et gourmand à la fois, pendant qu’elle vint caresser l’une des joues endolories de la fillette. Pendant un an, elle fut encore tranquille. Elle servait juste dans les étuves de son barbillon apportant les boissons aux différents couples. Parfois, une main possessive venait la prendre sur ses genoux en lui volant davantage qu’un bécot, mais la ou les trainées que le client s’était payées s’occupaient de lui faire changer d’idée. Ce fut cette année là qu’elle découvrit pour la première fois son reflet dans un miroir, qui lui renvoya la physionomie inconnue d’une fille pâle aux yeux farouches et trop fixes dans leurs couleurs différentes, comme ceux d’une chatte méchante guettant sa proie. La lumière sourde des étuves mêlait une teinte soufrée à la chevelure désordonnée. La glace lui montrait une pauvre fille déchue et pourtant, dans ce reflet, elle se vit sourire d’un air sardonique, amusée par ce qu’elle voyait. « C’est donc ça l’diablesse ? Ils sont con l’gens, il faudrait qu’il l’regarde mieux pour trouver quelque chose à ronger. » Dans un geste, elle passa ses mains sur sa taille fine, puis sous ses seins grandissant. L'Éliroise avait raison, elle commencerait bientôt le marché… Et elle commença le tapin avant d’être véritablement femme. Ce fut la découverte d’une grossesse par un flot incoercible de vomissements qu’elle discerna que sa féminité était venue. Ce fut avec un reliquat de sourire que Sláine s’essuya la bouche avec le dos de sa main, l’autre était appuyée à une devanture de maison bourgeoise. « T’vais raison L'Éliroise. Murmura-t-elle dans un souffle, alors que la catin qui la couvait depuis son arrivée lui frottait le dos de sa main. — Tu t’y f’ras. Faut faire cueillir c’fruit avant qu’il s’accroche. » Non, ce fut une chose à laquelle elle ne s’acclimata jamais, ce ne fut pas l’unique marmot qu’elle fit glisser d’entre ses cuisses avant qu’il ne soit viable pendant une année et demi. L'Éliroise la trouvait drôlement féconde pour une jeunette et Sláine lui renvoyait à la gueule qu’il était sûrement plus aisé de pondre lorsqu’on se faisait prendre par tous les trous. Elle eut de tout entre les cuisses : du jeune puceau qu’on envoyait apprendre la vie ou encore du vieux vicelard intéressé par sa jeunesse, ou plutôt sa poitrine et sa croupe, ainsi que par son regard. C’était certain qu’ils n’étaient pas courants ces saletés d’yeux ! Ce n’était pas de se faire passer dessus à longueur de journée qui était le plus dur, c’était de voir son visage changer et surtout de voir ce que subissaient les autres filles. Elle avait depuis toujours haï l’injustice et la cruauté, c’était ce qui l’avait fait partir narguer les femmes des bonnets. Ainsi, un jour alors qu’elle se trouvait dans la gargote attenant aux étuves de son barbichon, elle vit un noble malmener une des filles de façon trop insistante. Comme beaucoup finissaient par en mourir, pas qu’elle l’appréciât outre mesure, c’était le geste en lui-même qui lui fit se hérisser dans toute sa personne et il n’y avait aucun être pour l’aider. « Arrêtez ! Vous allez la tuer. — Ta gueule, la gueuse. Fit-il en repoussant la fillette qui s’était élevée pour parer un nouveau coup. Le prenant en plein visage, de ce geste Sláine fut éjectée contre une table. Saleté de putain, on vous fait l’honneur de vous baiser et vous n’acceptez pas ce qu’aucune de vous ne recevrait si on ne vidait pas nos burnes dans vos misérables carcasses ! Reprit l’homme, plein comme une outre, en ressaisissant la fille durement par les cheveux, lui renversant la tête. Sláine se redressa à demi avant de s’élancer. CRÈVE ! Suppôt de Franc-Ripault ! » Fit-elle avec le surin qu’elle avait pris à un autre client, avant d’enfoncer la lame profondément dans le ventre de l’homme. Mettant tous son poids et à deux mains, elle finit par remonter l’arme dans la cage thoracique du nobiliaire, la faisant craquer ; pleine de haine, emplie de hargne, ses prunelles étincelaient d’une lueur mauvaise et pour la première fois de sa vie, elles furent unies dans une allure glauque et terrible. Dans un geste de dégoût face au déchet qui agonisait, la jeune fille le repoussa au sol. Elle n’avait pas touché son cœur par manque de force néanmoins, les dégâts occasionnés étaient suffisants pour que son trépas ne fut pas miséricordieux. Pour la petite putain qu’importaient les conséquences liées à cette action : elle mourrait en paix avec elle-même. Pendant que les clients commençaient à comprendre ce qui s’était passé, l’un deux fut plus prompt que les autres. Il vint la chopper par la nuque et durement la plaquer contre un mur afin de l’assommer. Lors de son réveil, ce ne fut pas dans les geôles de Raiendal qu’elle se réveilla - pour les avoir déjà visitées, son souvenir était impérissable sur cet endroit - mais dans une petite cellule d’aspect rudimentaire et épuré. Malgré ce sentiment de dénuement qui se dégageait de la pièce, elle était bien… Installée sur une couche moelleuse et recouverte d’un drap dans un confort qu’elle ignorait possible. « Ce ne s’rait pas les soldats qui me f’raient ça. » Elle eut un rire de gorge rien qu’à imaginer l’aberration de la chose, avant de ramener contre son cœur la couverture qu’elle humât longuement en fermant les yeux jusqu’au moment où elle sursauta en entendant claquer la porte. Le client qui était dans la taverne et l’avait assommée s’approchait d’elle. D’un bond, elle s’accroupit sur le lit en fixant l’homme avec un air méfiant et surtout inquiet. « Tout doux ma fille, je ne suis pas là pour une vengeance, mais plutôt pour des félicitations et des remerciements : j’ai sauvé ta peau en t’emmenant ici. — Nous sommes où et pourquoi n’pas m’avoir foutue aux mains d’la garde ? — Tous simplement parce que tu es plus intéressante vive que morte. Tu m’as impressionné, pourquoi avoir attaqué ce soldat ? C’était une amie ? —Non, j’déteste la méchanceté gratuite et pour le simple plaisir… Sláine se sentait perdue, elle chancelait. Pourquoi quelqu’un tel que cet inconnu s’adressait à elle de cette façon, sans même une once de dégoût ? —Bien… Alors, ma fille je vais te faire une proposition, si tu refuses tu pourras partir librement. Tu me comprends ? Sláine fit un geste succinct de la tête. Bien, est-ce que tu souhaiterais aider le royaume de Kaerdum à allez plus loin qu’il ne l’est maintenant ? Protéger les opprimés et leur laisser une chance de vivre comme ils devraient ? Si oui, je te préviens que ce sera quelque chose de long et fastidieux à apprendre. J’ai vu que tu n’étais pas farouche et quelqu’un de déterminé. Le plus important pour toi est de savoir si tu veux faire ce que je te dis. — Pourquoi…Moi ? — Tu as des capacités rares pour ton âge et…. Une technique pour manier la dague qui.. M’a amusé. Dit l’homme avec un rire soufflé. Si tu veux plus de temps pour réfléchir, je te… — J’accepte. — Es-tu sûre ? C’est un choix sur lequel tu ne pourras reculer, sauf par la mort. ¬— Certain. — Marché conclu alors. Bienvenue Sláine. » Sláine en acceptant ce marché n’aurait pas imaginé que cela l’entrainerait aussi loin. L’homme de l’Aigle d’Argent avait pesé ses mots en évoquant Kaerdum, c’était à l’échelle de Rëa qu’il fallait s’étendre. Par ces termes, elle était entrée dans l’un des ordres les plus puissants au monde. Il avait dit vrai, ce ne fut pas facile pour elle de sortir du carcan que les bas-fonds avaient formé autour de sa personne. Sláine apprit des visions différentes du monde, celle des gens du commun, celle des bourgeois et ainsi que celle de la noblesse. Elle dut pour cela lisser son langage, ses manières, effacer des automatismes et se fondre dans la masse, ainsi qu’engranger du savoir. Mais surtout dans les premiers temps apprendre à lire et écrire. Ce fut le plus ardu pour elle : passer du statut d’illettrée à celui de lettrée. Il fut douloureux et encore aujourd’hui, ce n’était pas toujours aisé même si elle possédait une intelligence très vive : Sláine avait trop vécu dans son corps plutôt que dans son esprit pour apprécier toute la saveur et les subtilités de la connaissance. La partie où elle dut travailler physiquement fut plus aisée, elle connaissait son anatomie avec une netteté effrayante. Sláine apprit à doser chaque effort de façon précise pour ne pas gaspiller de l’énergie. Ce fut au zénith de ses quinze ans qu’elle commença à travailler sur le terrain, ses premiers assassinats en tant que sicaire furent basiques. La jeune fille apprenait la façon d’être qui allait être la sienne pour le reste de son existence, tuant sans aucune dissociation : Sláine suivait l’ordre les yeux fermés. Puis cela évolua. Parfois, des missions demandaient certaines habitudes de son passé. Ainsi, se faire passer pour une prostituée et tuer une cible au cœur de la couche lui fut demandé et ce, plus d’une fois. Néanmoins, avec les années, le doute survint. Pourquoi tuer certains innocents ? Chaque exécution qu’elle devait réaliser sur un être ignorant était de plus en plus difficile et à force de questions auprès de ses contacts et aux autres membres de l’ordre, Sláine vint un jour mettre les choses au point devant le grand Conseil. Elle allait appliquer ses règles : l’assassine ne tuerait que ceux qu’elle estimait mauvais ; ses missions, ses avis. Les dirigeants de l’Aigle d’Argent ne souhaitaient pas perdre son expertise et surtout son expérience en la vie. Peu de personnes avaient vécu autant en même pas onze années d’existence, sans compter ce qu’elle avait amassé en dix ans d’usage dans leur cœur. De plus avec le temps, la jeune femme avait fait sa place dans l’ordre. Elle avait la réputation d’exécuter chacune des missions qu’on lui donnait sans accroc, voire même à la perfection et à la donnée prête. Le Conseil finit par accepter les conditions de Sláine et elle put aborder les années de la vingtaine avec une paix qui s’était envolée avec la connaissance... Celle-ci qui était souvent un poids lourd à porter et cette charge dans son avenir allait être plus pesante encore, surtout lorsque quelques années plus tard on vint lui demander d’assassiner l’ombre. L’homme qui maintenait l’ordonnance dans l’Aigle d’Argent depuis trente ans devait être exécuté ? C’était en Auldera 89, peu de temps avant l’époque actuelle et la décision qu’elle distillera déterminera le reste de son futur. Une nouvelle fois, elle allait relancer les dés, si elle l'acceptait et la Sicaire savait pertinemment que si elle le faisait, elle partirait avec le mauvais œil, encore une fois. Pourtant, cette idée ne put que la faire rire, se moquer d’elle-même et de son ire vengeresse qu’elle transformait en croisade contre son propre souffle vital : pour le bien commun, disait Sláine ? Tout à fait…Pour cette raison, elle accepta, qu’importa si son chemin s’achevait par la mort. Lorsque le jour vint où elle exécuta l’Ombre, tout ne se passa pas comme prévu. La sicaire n’avait pas perçu la première vague de magie et ne découvrit la seconde que pendant son affrontement avec son maître, de l’homme elle ne connaissait que peu de choses : il lui avait donné une chance de devenir autre chose qu’une catin, qui serait surement morte maintenant et voilà comment elle le remerciait ! Elle fit plus que simplement le tuer, mais le tortura afin qu’il avouât ses desseins et surtout pourquoi ! Pourquoi lui ? Et dans cette folie, elle libéra sa magie, brute et puissante, mais surtout incontrôlable. Puisqu’elle avait connu les plus grandes douleurs physiques et mentales, elle savait procurer la souffrance sous toutes ses nuances et elle perdit le chef des Aigles d’Argent dans ces visions. Dans cette folie meurtrière et assassine, il lui raconta tout : la vérité, ses plans ainsi que d’autres choses sur l’avenir de Rëa et dans un dernier cri dément, il rendit son dernier soupir dans l’ombre de la capitale de Siltamyr. Il était mort de trouille et Sláine faillit le rejoindre tant elle se perdit dans les miasmes qu’elle lui avait projetés. Seul son passé la sauva. Depuis ce jour, elle disparut de la ville, de l’ordre, de tout… Ensemençant les terres sur son passage de monceaux de cadavres dans sa remontée vers son pays natal : que des pourritures qui détruisaient des vies. Sláine ne savait pas où aller, mais elle savait qu’elle devrait décider où son cœur la porterait pour le peu de temps qu’elle s’était accordée par la fuite. La maudite n’était qu’un cadavre en sursit, plus morte que vive et à chaque assassinat qu’elle perpétrait contre un notable d’Ordanie, elle savait que sa tombe approchait. La camarade allait enfin la reprendre, celle à qui elle faisait la nique depuis sa naissance. |